alternatives éducatives : des écoles, collèges et lycées différents
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I Obligation scolaire et liberté I Des écoles différentes ? Oui, mais ... pas trop ! Appel pour des éts innovants et coopératifs |
 

LES "MODÈLES" ANGLO-SAXONS :
(libertés, justice, santé, système scolaire, éducatif, marché de l'éducation, homeschooling ... aux USA et en Angleterre)
AMERICAN WAY OF LIFE
BRITISH WAY OF LIFE

La campagne des «patriotes» pour mettre sous contrôle encore plus étroit le système d'éducation est particulièrement dangereuse dans le contexte du large rejet de la science, phénomène qui plonge de profondes racines dans l'histoire américaine et qu'on exploite cyniquement depuis un quart de siècle pour de petits profits politiques.
Ce systéme de croyances est sans équivalent dans les sociétés industrielles.
Environ 40 % de la population croit que « les êtres vivants existent sous leur forme actuelle depuis le commencement des temps»
et soutient l'idée d'interdire l'enseignement de la théorie de l'évolution pour la remplacer par le créationnisme.
 

L'Entreprise mondiale d'exploitation :

BRITISH WAY OF LIFE

Le "modèle" anglo-saxon,  libéral  ... 
et blairo-socialiste

Royaume-Uni : 35% des élèves de 11 ans ne savent pas lire

Un demi-million de «sans-logement» en Grande-Bretagne
A Londres, un enfant sur deux sous le seuil de pauvreté

Un demi-million d'enfants britanniques travaillent "illégalement"

Royaume-Uni : «tolérance zéro» et conditions de détention intolérables
Plus de dix milles jeunes délinquants britanniques sont emprisonnés
«Le bilan du Royaume-Uni en terme d'emprisonnement des enfants
est l'un des pires qui se puisse trouver en Europe.»
Tony Blair : "tolérance zéro" face aux éléments perturbateurs dans les écoles

Royaume-Uni : Ecoles fermées aux pauvres

Un rapport émis par ConfEd, (une association qui représente les dirigeants du secteur de l’éducation locale) dénonce le manque d’intégrité des processus d’admission dans certaines écoles publiques.
Des réunions de "sélection" d’élèves sont organisées,
durant lesquelles ne sont admis que les enfants "gentils, brillants et riches".
Ainsi, 70 000 parents n’ont pas pu inscrire cette année leurs enfants dans l’école de leur choix.
En écartant les élèves issus de milieux pauvres, ces établissements "hors la loi" espèrent rehausser leur taux de réussite aux examens.
Pour lutter contre ces pratiques, le gouvernement s’apprête à proposer un nouveau système d’admission des élèves dans les écoles publiques.


5 September 2005

... et moins de pauvres dans les écoles primaires catholiques.

Les écoles anglaises pourront être gérées par des "trusts"

Les Britanniques inventent l'ultrason antijeunes

Grande Bretagne : premier pays où chaque déplacement de véhicule sera enregistré.

Blairo-socialisme : bilan globalement positif
Naître et grandir pauvre en Grande-Bretagne
est encore plus pénalisant que dans d’autres pays développés.

Royaume-Uni : Le créationnisme aux examens

Plus de 350 000 Britanniques ont quitté leur île en 2005
pour jouir d'une vie meilleure

Les jeunes Britanniques se voient vivre ailleurs
difficulté d' acquérir un logement, hausse de la fiscalité et indigence des services publics,
en particulier les transports et le système de soins.

Beuark.
Ségolène Royal rend hommage à la politique de Tony Blair.



  AMERICAN WAY OF LIFE...

45 millions de personnes sans système de santé
dans le pays le plus riche du monde

Le système de santé américain est le plus onéreux parmi les pays industrialisés
et l'un des moins efficaces en terme de nombre de personnes couvertes

États-Unis : L’abstinence sexuelle renforcée
131 millions de dollars (augmentation de 30 millions) pour les programmes fédéraux vantant auprès des collégiens et lycéens américains les mérites de l’inexistence d’une vie sexuelle avant le mariage. L’évaluation nationale des bienfaits réels de ces programmes a été reportée à 2006.

Des aberrations scientifiques pour mieux prêcher la chasteté
Cette année, 40 des 50 Etats doivent faire face à diverses procédures visant à contester l'enseignement de la théorie de l'évolution dans les écoles publiques.

Quelque 6000 étudiants sont attendus sur le campus  "sans péché" (l’Ave Maria University), 
qui ne connaîtra ni préservatifs ou autre moyen de contraception, ni homosexualité, ni avortement.

Le nombre total des armes à feu en circulation aux Etats-Unis est estimé à plus de 200 millions, dont 65 millions d'armes de poing, pour une population totale de 284 millions d'habitants.
Selon des statistiques gouvernementales remontant à la fin des années 90, les armes à feu sont la cause de la mort d'un enfant ou adolescent toutes les deux heures, par crime, accident ou suicide.
En 1997, ces armes ont été responsables de la mort de 32.436 personnes,
selon ces mêmes statistiques.

La "Home School Legal Defense Association" :
Liée à l’église évangélique,
« Les croisés américains du Home Schooling »



Christiane ROCHEFORT
("Les enfants d'abord") :

Pourquoi maintenant ?
Les enfants, qui n'ont jamais eu tant de bonheur et de pouvoir (disent les adultes), sont en réalité, maintenant, menacés.
Par-dessus les parents, dont la non-intervention est espérée, la Force Aveugle est en marche contre eux.
Car en dépit d'un traitement réducteur millénaire, les enfants ont toujours la rage de vivre.

L'Entreprise mondiale d'exploitation
La mécanique du jeu - Les parents pris au piège - Point d'ordre



Sa Majesté des mouches ...
(version 2008)

Pour stimuler la "construction de leur propre société" (= "Kid Nation" !) : chaque épisode se termine par un vote interne pour la remise d'un "prix" (une étoile en or d'une valeur de $20 000).
"There was no sex or drugs"

Ouf.
Just money...
Great, fantastic, fun !
God bless America !

"Failed States: The Abuse of Power and the Assault on Democracy"
Metropolitan Books, New York, juin 2006

Editions françaises :
" Les Etats manqués. Abus de puissance et déficit démocratique "
Fayard, 2007 - 10/18, oct. 2008
 

LES ÉTATS MANQUÉS
 

NOAM CHOMSKY
Extraits (chap. 6 - "La promotion de la démocratie chez nous")
 

/.../ Toujours mus par la même volonté d'étatisme réactionnaire pro-entreprises, les dirigeants républicains ont réorganisé tant le Congrès que la Maison-Blanche en «systèmes où tout vient d'en haut» : les décisions importantes sont confiées à un «cercle étroit de loyalistes de l'aile ouest *» dans l'exècutif, et le Congrès est contrôlé par «quelques leaders [et] loyalistes conservateurs» sur un mode proche de «l'organigramme d'une entreprise des 500 de Fortune». 

• L'aile ouest de la Maison-Blanche est le centre des activités de l'exécutif: 
c'est là que se trouvent, notamment, le «bureau ovale» du président, 
et, en sous-sol, la salle de gestion des crises, la Situation Room
Structurellement, l'équivalent politique de l'entreprise est l'État totalitaire. Les loyalistes sont récompensés, et ceux qui «contrarient les dirigeants du parti», promptement punis. L'offensive antidémocratique a des précédents, bien sûr, mais elle est en train d'atteindre de nouveaux sommets. Aucun bon connaisseur de l'histoire ne sera surpris de la voir s'accompagner des plus augustes missions et visions de démocratie (61).

Le système d'éducation n'est pas encore une filiale à 100 % du complexe État-entreprises, et il essuie donc, lui aussi, l'attaque des étatistes réactionnaires, indignés par le «parti pris libéral» qui traite de façon punitive les «étudiants conservateurs» et distille des dogmes antiaméricains, propalestiniens et de gauche - ces idées étant toujours accueillies avec transport et enthousiasme par un corps enseignant libéral, nous signifie-t-on implicitement. Comme s'y attendraient les lecteurs d'Orwell, l'offensive pour imposer le contrôle de l'État sur les programmes, le recrutement et l'enseignement se mène sous la bannière de la «liberté académique», nouvel exemple de recours sans vergogne à la technique «Au voleur, au voleur!». 

Bizarrement, la mainmise de la gauche antiaméricaine et propalestinienne sur le système d'éducation ne se reflète pas dans les publications universitaires, réalité ignorée avec soin par les «défenseurs de la liberté académique», qui lui préfèrent des anecdotes éparses d'un intérêt douteux. On remarque aussi l'absence d'un moyen pourtant évident d'évaluer l'ampleur de l'extrémisme anti-israélien qui s'est emparé, dit-on, des enseignants : l'organisation d'un sondage pour voir combien d'entre eux estiment qu'Israël doit avoir les mêmes droits que n'importe quel autre État dans le système international. Facile, mais mieux vaut éviter, pour des raisons que les organisateurs de la campagne comprennent fort bien. 

«Le Congrès est en train de prendre les premières mesures de pression sur les universités pour qu'elles assurent le maintien de l'équilibre idèologique pendant les cours, écrit la presse, initiative dont les partisans soulignent la nécessité pour protéger les étudiants conservateurs des mauvaises notes que leur mettent les professeurs libéraux» - assertions qui n'amuseront pas beaucoup ceux qui connaissent les réalités du monde universitaire. En Pennsylvanie, la Chambre des représentants «a voté une résolution créant un comité spécial chargé d'enquêter - dans les universités publiques de l'État­ -  sur la façon dont sont recrutés et promus les membres du corps enseignant, et de vérifier si les étudiants sont évalués équitablement, et s'ils ont le droit d'exprimer leurs idées sans crainte d'être punis pour l'avoir fait». Ce vote est «une victoire considérable pour la liberté académique», a déclaré David Horowitz, auteur de la déclaration des droits académiques, qui a été le fondement de ce texte de loi. L'opposition des milieux enseignants, a-t-il dit, «a été féroce, et leur défaite n'en est que plus amère». La «liberté académique» remporte une nouvelle victoire sur la liberté académique. 

Dans l'Ohio, s'inspirant des mêmes courageux défenseurs de la liberté académique contre l'assaut général de la gauche, le sénateur Larry Mumper a déposé un projet de loi pour «limiter ce que les professeurs d'université peuvent dire dans leurs cours». Sa «"déclaration des droits académiques de l'enseignement supérieur" interdirait aux enseignants des universités publiques ou privées de traiter en classe "avec insistance" de questions controversées, ou d'utiliser leurs cours pour promouvoir des idées politiques, idéologiques, religieuses ou antireligieuses». De nombreux professeurs, a précisé le sénateur Mumper, «ébranlent les valeurs de leurs étudiants, parce que "80 % d'entre eux [les professeurs] ou à peu près sont des démocrates, des libéraux, des socialistes ou des communistes encartés" qui tentent d'endoctriner les étudiants». On comprend pourquoi leur résistance à la liberté académique est si «féroce» et leur défaite si «amère» (62)

Certes, le projet a ses mérites : il permettrait d'épargner des sommes importantes en supprimant les sections d'économie, de sciences politiques, d'histoire et d'autres sciences humaines, qui, inévitablement, font la promotion d'idées politiques et idéologiques et traitent avec insistance de questions controversées - sauf si on les réduit, elles aussi, à évaluer les compétences et les connaissances de base. 

Des projets de loi semblables ont été déposés dans de nombreux parlements d'État. Les sections d'études moyen-­orientales et les programmes d'éducation à la paix sont particulièrement visés. L'État fédéral est aussi entré dans la mêlée. En octobre 2003, la Chambre des représentants «a voté à l'unanimité une loi qui pourrait mettre les sections universitaires d'études internationales dans l'obligation de manifester davantage de soutien à la politique étrangère américaine ou de prendre le risque de perdre leur financement fédéral». Ce texte visait particulièrement les études sur le Moyen-Orient: «Le postulat inhérent à la loi est clair : si la plupart des spécialistes reconnus estiment que la politique moyen-orientale des États-Unis est mauvaise, ce sont les spécialistes qui posent un problème et pas la politique», écrit Michelle Goldberg. Les enseignants se sentent «menacés de voir les centres [universitaires] punis s'ils n'adhèrent pas strictement à la ligne officielle venue de Washington, ce qui constitue une ingérence fédérale d'un niveau sans précédent dans un programme universitaire d'études régionales», conclusion qui pourrait se discuter si l'on prenait en compte des formes plus indirectes d'ingérence. Dans une importante analyse des scandaleuses attaques contre les sections d'études moyen-orientales et les cours d'éducation à la paix, l'éminent sociologue israélien Baruch Kimmerling a mis en garde contre les effets désastreux de «cet assaut contre la liberté académique mené par une coalition de néoconservateurs et d'étudiants juifs ardents, avec le soutien de certaines organisations juives "modérées" », et inspiré par « la croisade de Horowitz». Le titre de son texte était: « Des émeutiers "patriotiques" peuvent-ils s'emparer des universités ?». 
II a été refusé par la revue Chronicle of Higher Education. Dans le même esprit, Sara Roy, spécialiste du Moyen-Orient à Harvard, cite la charge de Horowitz contre 250 programmes d'éducation à la paix aux États-Unis, qui, assure-t-il, «apprennent aux étudiants à s'identifier aux ennemis terroristes de l'Amérique et à se représenter l'Amérique comme un Grand Satan qui opprime les pauvres du monde et les réduit à la famine. [ ... ] Combien de temps un pays en guerre contre des ennemis implacables comme Ben Laden et Zarqaoui peut-il survivre si ses institutions d'enseignement continuent à être poussées dans cette voie? C'est toute la question» (63)

Des questions assez différentes viennent à l'esprit, dont celles qui ont été posées par Fritz Stern dans Foreign Affairs, ou, du point de vue opposé, les mots du défenseur classique de l'autorité, Thomas Hobbes: «Les universités ont été pour cette nation ce que fut le cheval de bois pour les Troyens.» 
Elles doivent être « mieux disciplinées», poursuivait Hobbes: «Je désespère qu'il y ait jamais une paix durable parmi nous tant que les universités de notre pays n'inclinent et n'orientent pas leurs études vers [...] l'enseignement de l'obéissance absolue aux lois du roi.» II dénonçait les universités parce qu'elles « ont enseigné la subversion », préconisé la «souveraineté divisée», «loué les théoriciens antiques de la démocratie» et le refus religieux, écrit Corey Robin (64)

La campagne des «patriotes» pour mettre sous contrôle encore plus étroit le système d'éducation est particulièrement dangereuse dans le contexte du large rejet de la science, phénomène qui plonge de profondes racines dans l'histoire américaine et qu'on exploite cyniquement depuis un quart de siècle pour de petits profits politiques. Ce systéme de croyances est sans équivalent dans les sociétés industrielles. Environ 40 % de la population croit que «les êtres vivants existent sous leur forme actuelle depuis le commencement des temps» et soutient l'idée d'interdire l'enseignement de la théorie de l'évolution pour la remplacer par le créationnisme. Les deux tiers veulent qu'on présente dans les écoles à la fois l'évolution et le créationnisme, parce qu'ils sont d'accord avec le président qui préconise d'enseigner l'évolution en même temps que «le dessein intelligent», «afin» - ce sont ses propres termes ­«que chacun puisse comprendre sur quoi porte le débat»(65). Ses mentors savent sûrement qu'il n'y a aucun «débat». À la suite de toutes sortes de harcèlements ces dernières années, les étudiants et les enseignants étrangers, dont ceux de sciences et de technologie, ont de moins en moins envie de venir étudier et travailler aux États-Unis. Ces événements ont lieu sur fond d'hostilité de l'administration Bush à l'égard de la science, une administration prête à réduire la recherche des laboratoires universitaires sur laquelle repose l'économie avancée, au risque de casser le «pipeline de l'innovation». Un autre processus en cours est la mutation progressive des universités en entreprises, qui tend à nourrir chez elles les projets à court terme et le secret, entre autres. Les effets à long terme pour la société pourraient être graves. 
 

« Coudées Fanches » pour les entreprises 

Les conséquences des politiques pro-entreprises et pro-État sont devenues impossibles à dissimuler aprés la tragédie de l'ouragan Katrina. La Federal Emergency Management Agency (FEMA) avait inscrit un gros ouragan sur La Nouvelle-Orléans sur sa liste des trois catastrophes naturelles les plus vraisemblables aux États-Unis. «La Nouvelle-Orléans était le désastre numéro un dont nous parlions, a confié un haut responsable. Nous étions obsédés par La Nouvelle-Orléans, à cause du risque.» La FEMA avait organisé des exercices et mis au point des plans élaborés, mais ils n'ont pas été appliqués. Les forces de la Garde nationale qui avaient été envoyées en Irak «avaient emporté une bonne partie du matériel nécessaire, dont des dizaines de véhicules amphibies, de Humvees, de camions-citernes et de génératrices qui allaient manquer en cas de désastre naturel majeur dans l'État», écrit le Wall Street Journal, et «un haut responsable de l'armée de terre a expliqué les réticences de celle-ci à engager, de Fort Polk, la 4e brigade de la 10e division de montagne, parce que cette unité, qui compte plusieurs milliers de soldats, était en pleins préparatifs pour un déploiement en Afghanistan»(66)

Conformément à l'ordre des priorités de l'administration Bush, la menace de l'ouragan avait été déclassée, exactement comme celle du terrorisme. Ce désintérêt a touché de nombreux aspects du problème. Prenons la question des zones humides, facteur important pouir réduire la puissance des ouragans et des ondes de tempête. Les zones humides «étaient largement absentes quand Katrina a frappé», écrit Sandra Postel, l'une des raisons étant qu'«en 2003 l'administration Bush avait en fait vidé de sa substance la politique "pas de perte nette de zones humides", qui avait été inaugurée sous l'administration Bush père». De plus, d'anciens responsables de la FEMA ont expliqué que les capacités de l'agence avaient été « marginalisées de fait» sous la présidence Bush, quand elle avait été intégrée au département de la Sécurité intérieure avec moins de moyens, des couches bureaucratiques supplémentaires et une « fuite des cerveaux», puisque des personnels démoralisés s'en allaient, un peu comme à la CIA quand elle a été punie pour désobéissance. Jusque-là «agence fédérale de première catégorie», la FEMA, sous Bush, n'est même pas sur le siége arriére, a dit un haut responsable: «Elle est dans le coffre de la voiture du département de la Sécurité intérieure.» D'où son incapacité à mettre en œuvre réellement l'exercice que ses agents, un an avant Katrina, avaient simulé avec succès contre un ouragan sur La Nouvelle-Orléans. Les réductions de crédits de Bush avaient obligé le corps du génie de l'année de terre à réduire considérablement le travail anti-­inondations, dont le renforcement vraiment nécessaire des digues qui protégeaient la ville. Dans son budget de février 2005, Bush prévoyait une nouvelle réduction trés forte, «la plus forte jamais proposée», a écrit le Financial Times - c'est une spécialité du timing de l'administration Bush, tout à fait comme la réduction massive des crédits pour la sécurité des transports publics juste avant les attentats de Londres de juillet 2005, qui ont pris pour cibles les transports publics. En proportion de la dimension de l'économie, le budget de la Ia FEMA avait baissé d'environ 9 % dans les trois années précédentes, a signalé l'économiste Dean Baker. Le taux de pauvreté, qui avait augmenté sous Bush, atteignait 28 % à La Nouvelle-Orléans, et les dispositifs d'aide sociale, déjà limités, s'étaient encore affaiblis. Les effets ont été si épouvantables que les médias, toutes tendances politiques confondues, ont été atterrés par l'échelle de la dévastation et par sa sélectivité en fonction de la classe et de la race. Face à ce bilan lamentable, Paul Krugman a écrit que le programme de Bush avait créé un «État impuissant» pour la masse de la population, autre trait frappant des «États manqués» (67)

Tandis que les médias montraient des scènes saisissantes de malheur humain, les dirigeants républicains ne perdaient pas une minute pour «mettre à profit les mesures d'urgence sur la côte du golfe du Mexique frappée par l'ouragan afin d'atteindre toute une gamme d'objectifs conservateurs en matières économique et sociale». Citons parmi eux : suspendre les régies exigeant des firmes sous contrat avec l'État fédéral (celles qui joueront probablement les premiers rôles dans le prochain scandale de corruption) qu'elles versent des salaires normaux, une mesure de «réduction des coûts des entreprises» ; limiter le droit des victimes à porter plainte; donner des «bons de financement scolaires» pour les enfants au lieu de financer des écoles (ce qui constitue une prime aux écoles privées); réduire le financement des bons alimentaires, des cantines scolaires et des petits déjeuners à l'école (tout en publiant les chiffres sur la montée de la faim dans le pays) ; lever certaines contraintes environnementales; «renoncer à l'impôt sur les successions pour les décès dans les États touchés par la tempête» - quelle aubaine pour la population noire fuyant les taudis de La Nouvelle-Orléans! -, bref, montrer clairement, une fois de plus, que le cynisme est sans limite (68)

Bien que l'extrémisme style Bush ait sans nul doute accéléré les évolutions qui se sont révélées dans toute leur sauvagerie à La Nouvelle-Orléans, leurs racines sont bien plus profondes : elles sont à chercher dans le capitalisme d'État militarisé, qui suppose de négliger les besoins des villes et les services à la population en général, questions étudiées en détail par Seymour Melman, en particulier, depuis des années. «Une fois de plus, observe l'économiste Tom Reifer dans une analyse du désastre Katrina, l'idéologie de la sécurité nationale a joué un rôle crucial dans la lutte de classes acharnée qui se mène non seulement contre le tiers-monde, mais aussi contre la population intérieure, sur notre territoire (69). » 

Parmi les réalisations du premier mandat de George W. Bush, il y a eu d'énormes profits pour les entreprises tandis que les salaires stagnaient ou baissaient, et d'énormes réduc­tions d'impôts pour les riches afin de redistribuer vers le haut encore plus qu'avant. Ces politiques comptaient au nombre des multiples mesures bénéficiant à une infime minorité et susceptibles de provoquer à long terme un «déraillement budgétaire», qui compromettra les dépenses sociales à venir et transférera aux générations futures les coûts du pillage auquel se livrent aujourd'hui les très riches. (70)

Le second mandat de Bush a rapidement justifié ce grand titre du Wall Street Journal : «Bush commence à donner du concret au Big Business». Son premier triomphe législatif a été une loi sur les faillites, «élaborée avec l'aide de la profession [les sociétés de crédit] et soutenue par le président Bush», précisait le journal. Cette loi «s'en tient fermement à l'idée: la faillite est le problème de l'emprunteur, pas celui de la profession», et elle va donc «faire osciller le pendule juridique en faveur des créanciers sur cette vieille question». Elle cherche à régler les problèmes que crée l'industrie des cartes de crédit par ses énormes campagnes publicitaires pour stimuler un emprunt permanent chez les éléments les plus vulnérables de la population: ceux-ci se retrouvent confrontés à des dettes impossibles à rembourser et sont contraints, pour survivre, de solliciter la faillite personnelle. Adoptant les priorités des riches et des puissants, ce texte «ne fait pas grand-chose pour rendre l'industrie des services financiers responsable du crédit facile qu'elle offre aux consommateurs». Les parrains de la loi ont même rejeté une tentative «pour y insérer une limitation de la commercialisation auprès des étudiants de moins de 18 ans et un plafonnement des taux d'intérêt de certaines cartes de crédit». Les principes directeurs sont fondamentalement les mêmes que pour les prêts internationaux. La Banque mondiale et d'autres poussent à l'emprunt les riches et les puissants des pays pauvres, ces prêts à risques rapportent de gros intérêts, et, quand le système craque, des programmes d'ajustement structurel transfèrent les coûts aux pauvres, qui n'avaient jamais emprunté au départ et n'ont guère profité de l'argent, et aux contribuables du Nord. Le FMI sert d'«agent de police à la communauté des créanciers», selon la juste formule de son directeur exécutif aux États-Unis. Les mécanismes qui permettraient d'obliger les créanciers à supporter les coûts de leurs prêts à risques et à haut rendement sont bien connus, mais on fait comme s'ils n'existaient pas. (71)

Les problèmes que cause l'avidité de l'industrie financière sont graves. Le nombre des déclarations de faillite «a été multiplié par huit depuis trente ans, il est passé de 200000 en 1978 à 1,6 million» en 2004. On s'attend qu'il atteindra 1,8 million en 2005. «L'écrasante majorité est constituée de déclarations de faillite personnelle et non de dépôts de bilan d'entreprise.» Elles sont dues à la montée régulière de l'endettement des ménages, «qui se trouve maintenant à un niveau record par rapport au revenu disponible». Une cause première de cet endettement est l'inlassable pression des industries financières, qu'il faut à présent protéger des conséquences de leurs actes si lucratifs. Des études révèlent que «les probabilités d'une déclaration de faillite sont trois fois plus élevées pour les familles avec enfants que pour celles qui n'en ont pas, [et] que plus de 80% d'entre elles donnent comme raison la perte d'emploi, des problèmes de santé ou la séparation ». Environ la moitié des déclarations déposées en 2001 étaient dues au coût des soins médicaux. « Même des familles assurées de la classe moyenne connaissent souvent la catastrophe financière en cas de maladie» (72)

«La limitation de l'accès aux services de santé est une épreuve financière qui menace la qualité de la vie des Américains plus directement que toute autre» : c'est la conclusion d'une enquête Gallup. À partir de janvier 2005, «les frais médicaux sont en tête de liste lorsqu'on demande aux Américains de citer le problème financier le plus important auquel est confrontée leur famille». Voici la révélation que les directeurs d'enquête considèrent comme la plus «ahurissante» : seuls 6 % des Américains « se sont dits satisfaits du coût total des soins médicaux aux États-Unis », tandis que 71 % ne l'étaient pas et 46 % «pas du tout». Un tiers des personnes interrogées ont dit qu'elles avaient renoncé à se soigner l'année précédente pour des raisons financières; comme on pouvait s'y attendre, le pourcentage est beaucoup plus élevé chez ceux qui ont de faibles revenus ou qui situent leur santé entre «moyenne» et «mauvaise». Plus de la moitié avaient arrêté un traitement pour des affections très graves ou assez graves, chiffre qui passe à 69 % chez ceux dont les revenus sont inférieurs à 25 000 dollars. «Le revenu est devenu une sérieuse entrave à l'accès aux services nécessaires», ce qui veut dire que ceux qui ont le plus besoin de soins ne sont pas soignés, observe Gallup. 

/ ... /


62) - Jim VandeHei, Washington Post Weekly, 30 mai-5 juin 2005 Kaitlin Bell, Boston Globe, 8 août 2005. « A Win for "Academic Bill of Rights" », InsideHigherEd, 7 juillet 2005. Kathy Lynn Gray, Columbus Dispatch, 27 janvier 2005. 

63) - Michelle Goldberg, Salon.com, 6 novembre 2003. Baruch Kimmerling, www.dissidentvoice.org, 29 mars 2005. Sara Roy, London Review of Books, 17 février 2005. 

64) -  Corey Robin, La Peur: histoire d'une idée politique, trad. fr. de Christophe Jacquet, Paris, A. Colin, 2006, p. 55 (Fear : The History of a Political Idea, Oxford, 2004, p. 40). 

65) - Laurie Goodstein, New York Times, 31 août 2005. 

66) - Frank James et Andrew Martin, Chicago Tribune, 3 septembre 2005. Thom Shanker et al., New York Times, 2 septembre 2005. Robert Block et al., Wall Street Journal, 6 septembre 2005. 

67) - Sandra Postel (spécialiste de la politique de l'eau et des écosystèmes), Christian Science Monitor, 7 septembre 2005. Edward Alden, Financial Times, 4 septembre 2005; Edward Alden et al., Financial Times, 2 septembre 2005. Dean Baker, Center for Economic and Policy Research, Economic Reporting Review (en ligne), 12 septembre 2005. Paul Krugman, New York Times, 2 septembre 2005. 

68) - John Wilke et Brady Mullins, chronique « Marché », Wall Street Journal, 15 septembre 2005. Dean Baker calcule que la prime à l'école privée est proche de 50 % ; Center for Economic and Policy Research, Economic Reporting Review (en ligne), 26 septembre 2005 ; voir aussi 12 septembre 2005. Aide alimentaire et faim: voir supra, p.287. 

69) - Tom Reifer, Focus on Trade, n° 113 (Focus on the Global South), septembre 2005. Seymour Melman, Alter Capitalism, Knopf, 2001, qui résume et élargit une grande partie de son travail antérieur, tout en traçant les lignes directrices d'un avenir très différent et plus démocratique.

70) - Voir supra, p. 306. 

71) Alan Murray, Wall Street Journal, 3 août 2005. Michael Schroeder et Suein Hwang, Wall Street Journal, 6 avril 2005. Pour une analyse et de nombreuses sources, voir Robin Hahnel, La Panique aux commandes. Tout1ce que vous devez savoir sur la mondialisation économique, trad. fr. de Mickey Gaboriaud, Marseille, Agone, 2001 (Panic Rules 1, South End, 1999); et mon livre Rogue States, chap. 8. Sur des solutions de remplacement, voir Robert Blecker, Taming Global Finance, Economic Policy Institute, 1999. 

72) Timothy Egan, New York Times, 21 août 2005. David Himmelstein et al., Health Affairs, 2 février 2005. Pour un résumé, voir Kayty Himmclsteill, Dollars & Sense, juillet-août 2005. Voir aussi David Himmelstein et Sterne Woolhandler, «Mayhem in the Medical Marketplace», Monthly Review, décembre 2004. 

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