alternatives éducatives : des écoles, collèges et lycées différents
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Il est grand temps de changer l'école
 Claire BRISSET - 22.12.05 -  Le Monde

Notre système scolaire s'est transformé en machine à exclure. Comment s'en étonner quand les programmes destinés aux collégiens sont élaborés dans un jargon incompréhensible, quand les enseignants sont mal préparés et les outils inadaptés ?
Identifier « l'énoncé ancré dans la situation d'énonciation et l'énoncé coupé de la situation d'énonciation » ; analyser les « pronoms déictiques » et les « didascalies d'énonciation ». Ce stupéfiant jargon, qui forme un volume, n'est pas destiné aux agrégés de grammaire. On le trouve tel quel dans un manuel de français à l'usage des élèves de troisième (éditions Hatier, 2003).

La chose est déjà formidable. Tout aussi formidable est la rédaction du programme élaboré par l'éducation nationale pour cette même classe de troisième ; il est en effet de la même eau, précisant que « l'accent est mis en classe de troisième sur la dimension axiologique du lexique », et les auteurs des manuels reprennent ces programmes à la lettre, sans l'ombre d'une modification.

Nous avons donc des adolescents de 15 ans soumis à ces consignes incompréhensibles, alors même que l'on se désole de voir plus de 100 000 enfants quitter le système scolaire sans aucune qualification. Quelle formidable machine à exclure que ces programmes totalement coupés de la langue, de la vraie langue, celle qui sert à communiquer ! Quel extraordinaire aveuglement sur la vie réelle des enfants, des adolescents et sur leurs enseignants, que de leur imposer le maniement de concepts dérivés de la linguistique la plus savante, directement importés de l'Université au collège !

Il est temps, vraiment temps, de dire et de redire que l'école s'adresse aux enfants, aux adolescents, qu'elle doit leur parler une langue qu'ils comprennent ; grand temps de soutenir les efforts des enseignants à qui la société confie ce qu'elle a de plus précieux.

Notre société continue de s'interroger constamment sur le rôle de l'école : est-elle avant tout un outil de transmission du savoir ? Ou bien un lieu d'éducation, au sens large du terme ?
Sur cette question, soyons clairs. Le débat devrait être tranché depuis quinze ans, depuis que la France a ratifié la Convention internationale sur les droits de l'enfant, qui précise très clairement dans ses articles sur l'éducation que cette dernière doit viser à « favoriser l'épanouissement de la personnalité de l'enfant et le développement de ses dons ». Si on l'ose écrire, la messe est dite : l'école est certes un lieu de transmission du savoir, mais aussi un lieu d'éducation.

ELÈVES ET PROFESSEURS SOUFFRENT

Est-ce le cas ? Est-ce le cas dans un pays, le nôtre, qui continue à penser que pédagogie et psychologie de l'enfant et de l'adolescent ne doivent occuper qu'une place marginale dans la formation des futurs enseignants, sous prétexte que la pédagogie serait un don inné ? De tous les pays industrialisés, la France est le seul à maintenir cette position dont on mesure à quel point elle peut placer les enseignants, notamment les plus jeunes, en très grande difficulté. Cela me semble être un point essentiel : la psychopédagogie doit trouver une place centrale dans la formation de tout enseignant, et un véritable tutorat des jeunes professionnels par les plus anciens doit être restauré.

Ce tutorat s'est délité au fil du temps, et de très jeunes professeurs se voient confier des classes qui les angoissent, sans y être suffisamment préparés. Ils s'en plaignent d'ailleurs amèrement.

Le ministre de l'éducation, Gilles de Robien, s'est engagé dans un travail absolument essentiel pour l'avenir de l'école, donc des enfants et adolescents de notre pays : revoir les programmes de formation des futurs enseignants - à savoir leur donner réellement les outils dont ils ont besoin.

Sans cet effort, sans ce travail de fond, notre système scolaire continuera, sur sa lancée, d'exclure, année après année, des dizaines de milliers d'enfants dont il a pourtant la responsabilité éminente de préparer l'avenir. Ce travail courageux doit être soutenu et salué, comme le sera, je l'espère, le chantier - qui reste entièrement à mener - sur l'adaptation des programmes et des manuels.

En d'autres termes, changer l'école, ce n'est pas seulement ouvrir le dossier de l'éducation prioritaire. Certes, ce point est, lui aussi, essentiel, et les mesures annoncées, qui parent au plus pressé, auraient dû être prises depuis longtemps.
Mais elles ne suffiront pas. C'est l'ensemble de notre système scolaire qui est en très grande souffrance : et pour les enfants qui y vivent, et pour les adultes qui y travaillent, et pour les parents que l'école a trop longtemps laissés, eux aussi, sur le bord du chemin.

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