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ÉCOLE
La face cachée de Claude Thélot
 

Son rapport sur l'école sera publié le 12 octobre. 
Au terme de travaux houleux, où l'agressivité l'a souvent emporté sur le dialogue et la neutralité

Par Véronique Grousset  - figaro magazine - 18 septembre 2004
Les deux derniers démissionnaires d'une longue liste ont claqué la porte le 8 septembre. Mais cela faisait déjà plusieurs mois que nous recevions des mails découragés de certains membres de la commission : «X est parti depuis longtemps, Y ne vient plus que par intermittence, Z est à deux doigts de craquer. Thélot a fait le vide de ses contradicteurs : il ne reste pratiquement plus que les pédagos et les idéologues de l'Ed'Nat'.»

A l'évidence, les travaux de la commission chargée d'élaborer la synthèse du grand débat sur l'école se sont donc déroulés dans une ambiance très éloignée de «la recherche d'un consensus» qui avait été demandée à son président, Claude Thélot, un polytechnicien de 57 ans, pourtant salué de toutes parts à sa nomination comme «une personnalité indépendante et ouverte au dialogue, l'un des meilleurs connaisseurs du système éducatif». Le candidat idéal pour un tel poste.

Le problème étant qu'à l'époque, rares étaient les personnes qui le connaissaient. Et plus rares encore les voix qui auraient pu s'élever pour contester une image aussi parfaite. Après vingt ans passés dans l'anonymat de l'Insee, puis sept à la direction de l'évaluation et de la prospective (DEP) du ministère de l'Education nationale, couronnés par la présidence du Haut Conseil du même nom, Claude Thélot n'avait rien d'un personnage public. Les seuls journalistes qui le fréquentaient étaient ceux spécialisés dans l'éducation, friands des rapports et des tableaux chiffrés que cet expert en statistiques leur livrait régulièrement sur «l'état de l'école». D'où sa réputation d'impartialité. Les chiffres ne mentent pas, n'est-ce pas ? Donc Claude Thélot non plus. CQFD.

Il fallait vraiment avoir l'esprit soupçonneux, comme nous, pour s'interroger davantage. Simple réflexe en fait : dès le milieu des années 90, alors que Claude Thélot dirigeait depuis cinq ans le service de l'évaluation, ses bilans sous couverture glacée inspiraient en effet plus que des doutes. Trop optimistes. Trop elliptiques. Sans grand rapport avec la réalité du terrain. 
A la fois juge et partie 

Ce que confirme Isabelle Voltaire, une ancienne enseignante affiliée au Snes, aujourd'hui à la retraite, qui travaillait alors à la DEP : «L'évaluation était faussée dès le départ par la facilité des exercices proposés et surtout par les consignes de notation qui les accompagnaient. A travers les tests que nous étions chargés d'élaborer pour les élèves, les subordonnés de Claude Thélot ne cherchaient que ce qu'ils voulaient trouver. Et quand le résultat ne leur convenait pas quand même, ils l'enterraient. C'est ce qu'ils ont fait notamment pour l'étude sur la comparaison entre le niveau des écoliers de 1920 et celui des collégiens de 1995. Les exercices étaient beaucoup plus faciles, et notés différemment, mais comme cela n'avait pas suffi, il n'y avait pas eu de conférence de presse, ni aucune publicité. L'étude n'a jamais été distribuée, ce qui n'empêche pas qu'aujourd'hui, elle est "introuvable", prétendument "épuisée". Et pourtant, au départ, c'était une idée de Claude Thélot ! »

Dommage que Luc Ferry n'ait pas entendu parler de cette anecdote. Ni jamais mis en doute l'impartialité des bilans élaborés par son propre ministère. Cela lui aurait permis de comprendre qu'en nommant Claude Thélot à la direction du grand débat sur l'école, ainsi qu'à la présidence de la commission chargée d'en rédiger la synthèse, il était sûr et certain que les vrais problèmes de l'école ne seraient pas plus traités qu'ils ne l'ont été depuis quinze ans. 

«Claude Thélot était à la fois juge et partie. Il défendait le statu quo, et pour cause, puisque le bilan de l'école telle qu'elle est, c'est le sien !» observe Elizabeth Altschull, une enseignante d'histoire membre de la commission, qui en a suivi les travaux jusqu'au bout, en dépit du climat «insupportable » qui y régnait : «Nous n'avons débattu d'aucun sujet essentiel en séance plénière : ni du contenu des programmes, ni des méthodes d'enseignement, ni de l'orientation. Aucun compte n'a été tenu de la virulence des critiques contre les IUFM. On nous abreuvait d'auditions inutiles pendant que le rapport était élaboré en sous-commissions, ou dans de petites réunions confidentielles auxquelles nous n'étions pas conviés, ou alors au dernier moment, à des horaires impossibles, ce qui faisait que seuls les technocrates détachés par le ministère pouvaient y assister.»

Alain Finkielkraut, qui cessa très vite d'assister aux séances, dénonce aussi «le discours extatique sur l'école», ainsi que «le climat d'hostilité et d'agressivité» que Claude Thélot laissait s'installer «sans jouer le rôle d'arbitre qui aurait dû être le sien». 
Mais ce qu'il ne sait pas, parce qu'il n'était pas là, c'est qu'il est arrivé aussi que le président s'en prenne lui-même à certains de ses commissaires. De façon suffisamment brutale pour que d'autres interviennent en dénonçant une ambiance de «chasse aux sorcières» et de «procès stalinien». Pas neutre, très coléreux, et ne supportant pas la contradiction : Claude Thélot était-il vraiment le candidat idéal pour une mission d'une aussi grande importance ?
 

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