innovation :
Compost de fruits dans le système bancaire, éducatif, et citoyen En août, personne ne profite des invendus de Rungis Alors que les associations caritatives sont très sollicitées cet été, les fruits et légumes invendus de Rungis ne sont plus redistribués. Pour cause de vacances, le système de récupération de la Banque alimentaire est en sommeil. Pendant l'été, des dizaines de tonnes de fruits et légumes habituellement récupérés par des associations caritatives au marché de Rungis (Val-de-Marne) sont broyés pour être transformées en compost. Ce gâchis considérable s'explique par la fermeture estivale de la plupart de ces structures. Ainsi la Banque alimentaire, officiellement chargée depuis un an de redistribuer les invendus du marché d'intérêt national (MIN) aux différentes associations, a mis son personnel et ses bénévoles en vacances à partir de ce week-end. « Faute de bras, indique-t-on au bureau d'Arcueil, le ramassage de ces produits ne redémarrera qu'en septembre. » L'association seine-et-marnaise Pain de l'espoir, qui participe au tri et à la récupération des produits frais destinés à la Banque alimentaire, attend elle aussi la rentrée pour reprendre ses activités. Les grossistes se limitent à de discrètes donations. Vacances ou pas, les besoins sont pourtant toujours là. Les associations qui continuent à oeuvrer pendant l'été dans toute l'Ile-de-France observent même, cette année, une augmentation de la demande de la part des plus démunis. A Rungis, dans les allées du plus
grand marché du monde, des religieuses d'une congrégation
du Val-d'Oise n'hésitent pas à solliciter directement les
grossistes.
Au total, en un an, 5 000 tonnes de fruits et légumes vont subir ce traitement. De quoi venir en aide à des milliers de familles. Rahim Bellem
Le Parisien 08 août 2004
Et pourtant la demande augmente Les responsables de l'antenne du Secours populaire français de Savigny-sur-Orge (Essonne) n'avaient jamais vu ça. Hier matin, 70 personnes ont fait la queue pour une distribution de colis alimentaires. « C'est beaucoup pour l'été, explique Isabelle Neveux, la responsable. Et le phénomène était plus important encore en juillet. » Lait, oeufs, farine, couches : Marie, 32 ans, maman de quatre enfants, garnit son sac à dos. « C'est la première fois que je viens, avoue-t-elle. J'ai un peu honte. Mais avec le RMI pour élever quatre enfants, ce n'est plus possible. » A Paris, chaque soir, c'est une file compacte
et nerveuse qui se forme aux portes du cimetière du Père-Lachaise
(XX e ) où Coeur de Paris organise elle aussi des distributions
de repas.
David Charpentier et Julie
Cloris
La pauvreté s'aggrave cet été Le Parisien - 10 08 04
SAMEDI MATIN, antenne locale du Secours
populaire français (SPF) de Savigny-sur-Orge. La file d'attente
gonfle à l'extérieur. « Nous sommes aujourd'hui
à soixante-dix familles qui sont venues chercher des colis alimentaires
à l'occasion de la distribution mensuelle », constate
Isabelle Neveux, présidente du comité local du SPF.
13 167 allocataires du RMI
Plus inquiétant, les bénévoles de l'association caritative doivent désormais faire face à l'arrivée de personnes qu'ils ne voyaient pas auparavant. A la cohorte des SDF et des personnes d'origine étrangère viennent désormais s'ajouter de jeunes mères de familles d'une trentaine d'années et même des salariés qui n'arrivent plus à joindre les deux bouts. Marie-Hélène, 46 ans et mère divorcée avec quatre enfants à charge, ne comprend toujours pourquoi elle doit faire appel aux aides du SPF de Savigny. «Je suis comptable dans une petite entreprise du VIII e arrondissement de Paris, détaille-t-elle. Et pourtant même avec un salaire de 1 200 € par mois, je ne m'en sors pas. » Au début de chaque mois, cette mère de famille fait ses comptes, déduit les factures et le loyer à payer : il ne reste plus que 369 € exactement pour manger, s'habiller... Autant dire que c'est quasi-mission impossible, sans l'aide extérieure du Secours populaire. Et à Marie-Hélène d'énumérer toutes les privations qui rendent l'existence encore plus frustrante : « Je roule avec une voiture qui a seize ans. Pour les vêtements, je m'habille toute l'année avec les deux mêmes pantalons et en hiver je porte le même manteau depuis dix ans. » Comme Marie-Hélène, Isabelle
bénéficie de l'aide du SPF. Mais les difficultés n'empêchent
pas ces deux mères de famille d'être à leur tour des
bénévoles du Secours et de distribuer elles aussi les colis
alimentaires. « J'explique souvent que c'est plus facile de dépasser
la gêne ou la honte de faire appel à nos services en aidant
à son tour », explique la responsable du Secours populaire.
Pourtant, Isabelle, 38 ans, aurait suffisamment de son lot de problèmes
pour s'occuper toute la journée. Embauchée comme femme de
ménage sur le secteur, elle vient d'être licenciée
sans préavis après une opération chirurgicale à
la main. La jeune femme dispose en tout et pour tout de 176 € par
mois pour faire manger ses deux enfants de 4 et 16 ans et se loger. L'explosion
de la pauvreté, Isabelle la prend en pleine figure. « Je
le vois bien dans mon quartier des Prés-Saint-Martin, les trois
quarts des habitants viennent au Secours ou se font aider par d'autres
associations », conclut-elle.
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