Des communes d'Isère
sont mécontentes de devoir refaire leur réseau d'eau pour
STMicroelectronics
Le Monde - 21.10.05 - GRENOBLE de notre correspondante
C'est dans cette zone qu'est implanté le fabricant de semi-conducteurs STMicroelectronics, qui a annoncé, le 28 septembre, sa décision de supprimer 321 emplois en France, dont 85 à Crolles (Le Monde du 30 septembre), Estimé à 25 millions d'euros, le projet est destiné, en effet, à répondre aux besoins des industries de la micro-électronique, très consommatrices en eau qu'elles utilisent pour le nettoyage des plaques de silicium. "Les débits de pointe ont doublé en cinq ans ", relève le rapport qui sert de fondement à l'enquête publique. La consommation d'eau quotidienne est évaluée en 2004 des deux communes de Crolles et de Bernin à 13 950 m3 en moyenne (16 620 m3 en périodes de pointe), soit 10 % à 15 % (jusqu'à 20 % en période de pointe) de la consommation totale du Sierg qui regroupe 36 communes représentant 236 000 habitants. A l'horizon 2020, ces besoins sont évalués à 25 500 m3 d'eau en moyenne par jour (29 325 m3 en période de pointe). La capacité de la canalisation existante ne permettant pas de répondre à l'augmentation de la demande, le Sierg a décidé de construire une seconde canalisation sur 18 km. "La présence d'une ressource en eau abondante et naturellement pure, a participé à la décision de STMicroelectronics de s'implanter à Crolles" , justifie le président (PC) du Sierg, Claude Bertrand, vice-président du conseil général de l'Isère. Le projet suscite pourtant l'inquiétude de plusieurs associations, dont l'UFC-Que choisir , regroupées depuis cet été au sein du Collectif eau de la région grenobloise (Coerg). Celui-ci s'interroge sur les conséquences du projet sur la facture d'eau des usagers. "Le financement des investissements sera assuré par la consommation supplémentaire", assure Claude Bertrand. Pour parer "à toute baisse brutale, voire à une suppression pure et simple de la demande par abandon du site par STMicroelectronics, ou par changement radical dans le processus de fabrication" , M. Bertrand a sollicité le conseil général de l'Isère pour garantir les emprunts engagés par le Sierg pour financer les travaux. "POIDS DE LA DETTE" "Il ne serait pas envisageable pour les communes adhérentes au Sierg d'avoir à faire supporter le poids de la dette résiduelle sur leur population à travers une augmentation du prix de l'eau qui pourrait être alors de 40 %" , reconnaissait l'élu dans un courrier adressé au président (PS) du conseil général, André Vallini, daté du 5 août 2003. "Au prétexte qu'une entreprise peut potentiellement délocaliser un jour ou être en difficulté, il ne faudrait plus rien faire pour accompagner le développement économique" , s'agace François Brottes, député et maire (PS) de Crolles qui craint que "les entreprises n'accélèrent leur délocalisation". Quelques jours après l'annonce des 1 240 emplois supprimés par Hewlett-Packard, la demande est néanmoins devenue embarrassante pour le conseil général qui n'a d'ailleurs toujours pas délibéré. Le Sierg se dit prêt à retirer le projet s'il n'obtient pas les garanties. Le collectif d'association réclame "un débat public sur l'utilisation de la ressource en eau de la région grenobloise la plus conforme à l'intérêt général" . S'appuyant sur les conclusions du premier commissaire enquêteur, il dénonce l'absence de présentation au dossier d'enquête d'une solution alternative moins onéreuse, qui a fait l'objet d'une estimation de la Régie des eaux de Grenoble, l'autre producteur public d'eau potable de la région grenobloise (175 000 abonnés). Cette solution, environ "25 % moins chère" , confirme son président (Vert) Vincent Fristot, consisterait à raccorder la conduite supplémentaire du Sierg à son réseau, en capacité de supporter des débits trois fois supérieurs à ceux qu'il véhicule aujourd'hui. Le Sierg, au contraire, sera obligé à terme de renforcer ses capacités de transit dans sa partie amont, voire d'aller chercher de l'eau dans le massif de l'Oisans et de l'acheminer, notamment par un tunnel de 7 km creusé sous le massif de Belledonne, ce qui représenterait un investissement supplémentaire de plus de 100 millions d'euros. Le porte-parole du Coerg, Didier Medori, regrette que "les collectivités s'engagent dans des équipements surdimensionnés alors que les industriels ne garantissent pas l'évolution de leur consommation" . La direction de STMicroelectronics a confirmé que "dans le cadre de [sa] visibilité actuelle, des prévisions pour 2020 seraient sans fondement". Nicole Cabret |