alternatives éducatives : des écoles, collèges et lycées différents
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I Obligation scolaire et liberté I Des écoles différentes ? Oui, mais ... pas trop ! Appel pour des éts innovants et coopératifs |

I Tous les 20 ans : 4 ETABLISSEMENTS "EXPERIMENTAUX" I
 
 

"à propos de collège ... où en sont les projets de création de collèges et lycées "expérimentaux" (publics)?"
Rentrée 2008 : Nouvelle rustine sur une bouée, une baudruche,  ou un canot de sauvetage ?
Peut-être, tout simplement, pour ceux n'ayant pu bénéficier d'un charter vers l'Afrique,
trois ou quatre "charter schools" made in france ?
 
 
 

Tout doit changer à condition … que rien ne bouge.
ALORS,
CONTINUEZ D'AVOIR RAISON!
 

 
Chapitre 1
… Il était une fois…
 

L’école du Bassin de la Villette est ouverte depuis le 2 septembre 2002. Depuis deux ans cette école a fait l’objet de bien des rumeurs, de bien des effets d’annonces, de bien des bruits.

En Octobre 2000 après la rencontre entre des citoyens du quartier ayant obtenu de haute lutte la construction des murs d’une école, et des enseignants  volontaires et intéressés, se constitue une association « Déqlic 19 » (Développement de l’Ecole du Quai de la Loire par l’Initiative Citoyenne).
Cette association a pour objectif principal de faire que l’école du Quai de la Loire
( officiellement appelée école du Bassin de la Villette) devienne une école différente quant  à la pédagogie et aux pratiques éducatives, tout en s’appuyant sur la loi d’orientation de l’Education Nationale de 1989, définissant l’organisation de l’école primaire (maternelle et élémentaire), en cycles d’apprentissages.

Les membres de cette association, citoyens du quartier, parents d’élèves, enseignants de l’Education Nationale, écrivent un projet dans ce sens, projet d’école publique, sectorisée, intégrée au quartier.
Dès le début, ce projet est attaqué par des personnes se réclamant de syndicats, de partis ou d’administrations, en invoquant entre autres :
« Vous voulez faire une école en dehors des lois… ».
« Vous voulez faire une école de “petits blancs”…».
« Vous voulez faire une école privée … ».
« Vous voulez faire une école pour vos enfants, entre vous … »

De plus, ce projet de l’association (qui se voulait une base pour que l’équipe qui serait nommée établisse, comme la Loi l’exige, le futur projet d’école), demandait à ce que les personnels nommés sur l’école du Quai  de la Loire le soient aussi sur les bases de ce projet et non par la seule règle de nomination des enseignants en vigueur appelée «Mouvement».
Ce fut la deuxième vague d’attaques des mêmes personnes quand elles se rendirent compte que les premières étaient mensongères au regard du contenu écrit du projet.

« Vous ne pouvez déroger aux règles du Mouvement, garantissant l’égalité républicaine ».

Or l’association ne voulait pas de dérogation aux règles de nominations des enseignants. Elle voulait seulement que ces règles soient redéfinies aussi en fonction des besoins des élèves et non seulement en fonction du seul statut des enseignants.
 
 

…En avril, ne te découvre pas d’un fil…

Après beaucoup de travail, de démarches, d’entretiens ou quasiment toutes les personnes rencontrées reconnaissaient l’intérêt du contenu du projet, la fin de non-recevoir fût de fait explicitement donnée dans une lettre du Directeur de l’Académie adressée au maire du XIXème arrondissement de Paris et lue en séance publique du conseil d’arrondissement du XIXème, le 2 avril 2002.

Le projet de l’association tel qu’il avait été voulu et conçu était officiellement mort.

Les enseignants intéressés par ce projet avaient quand même pour certains demandé l’école du quai de la Loire sachant très bien que ce n’était pas pour y mettre en place le projet Déqlic19, puisque celui-ci était devenu, de fait, caduque.
Ils avaient fait leur demande dans le respect des règles imposées par la circulaire académique, définissant des dates limites très précises et le mode d’inscription sur minitel.
D’autres enseignants de ce projet avaient demandé d’autres écoles ou étaient restés sur celles où ils exerçaient déjà.

… En mai, fait ce qu’il te plaît…

Les premiers résultats officieux du mouvement (en attente de réunions paritaires destinées à régler des problèmes particuliers et d’arrêtés officiels d’affectation) rendus publics par des syndicats enseignants fin mai, faisaient apparaître plusieurs points.

1- Quelques enseignants parmi ceux cités plus haut étaient en principe nommés sur l’école du quai de la Loire.

2-  L’enseignante ayant postulé sur le poste de chargé de direction de cette école était arrivée en deuxième position  au barème derrière un directeur qui avait été :

déplacé de ses fonctions de direction dans une école des Yvelines, en cours d’année    scolaire et remis sur un poste d’enseignant dans une autre école des Yvelines, par l’inspecteur d’académie, suite à des conflits dans l’équipe enseignante et des plaintes de parents, en 1998 - 99.
déplacé un mois après la rentrée scolaire 1999 - 2000, par l’inspecteur d’académie de Paris d’alors, de ses fonctions de direction sur  l’école pierre Budin dans le XVIIIème arrondissement pour prendre la direction d’une école dans le XVIème arrondissement. Ce déplacement était la conséquence de conflits violents avec l’équipe enseignante et avec des parents d’élèves.
sommé par l’inspecteur d’académie de Paris actuel en avril 2002 de demander son changement de l’école qu’il dirigeait rue Vigée Lebrun dans le XVème arrondissement, où pendant deux ans des conflits avec l’équipe enseignante (7 personnes étaient partis la première année 2000 -2001, et beaucoup d’autres demandaient leur changement cette année), ont eu lieu ainsi qu’avec des parents d’élèves.
L’exigence de l’inspecteur était entre autres que ce directeur fasse une demande de mutation dans le sud est de Paris, précisément dans le XIIème arrondissement.
3-  La demande de mutation de ce directeur avait été faite sur ordre de l’inspecteur d’académie après le délai officiel autorisé sur le site minitel.
4-  Le directeur en question avait d’abord été en congé maladie puis, jusqu’à la fin de l’année scolaire devait exercer une mission au sein du rectorat de Paris. Son intérim de direction à l’école Vigée Lebrun était assuré par une autre personne. Il avait donc été de fait pour la troisième fois au moins déplacé de ses fonctions de direction par les autorités académiques.
5- Quatre personnes seulement sur l’ensemble des postulants aux fonctions de direction cette année sur le « mouvement » parisien avaient demandé l’école du Bassin de la Villette (nom officiel de l’école du quai de la Loire) en premier choix : ce directeur, la directrice faisant initialement partie du projet Déqlic 19 refusé et deux autres personnes inscrites cette année sur la liste d’aptitude aux fonctions de direction.
6- Les syndicats parisiens de SUD-éducation, Snudi-FO, SE, connaissaient très bien le dossier de ce directeur sur Paris et avaient l’intention de « prévenir » les enseignants nommés sur l’école du Bassin de la Villette dès la pré-rentrée.
7-  Le syndicat parisien SNUIPP soutenait et défendait ce directeur puisque l’administration l’Education Nationale n’entamait  pas de procédures administratives à son encontre.

… En juin, passe ton chemin…,

Toutes ces informations ont donné lieu aux démarches suivantes.

- Une lettre collective (adressée à l’inspecteur d’académie par la voie hiérarchique) de tous les enseignants en principe nommés sur l’école du Bassin de la Villette, s’inquiétant des informations circulant sur le directeur en principe nommé sur l’école et demandant à être informés plus précisément.

Aucune réponse au bout d’un mois.

- Une lettre de la directrice arrivée derrière ce directeur au barème,  adressée à l’inspecteur d’académie (et pour information au directeur de l’académie), s’étonnant d’une demande d’affectation hors délai de la part de ce directeur et demandant un entretien à l’inspecteur.
Un rendez-vous a finalement été accordé par l’inspecteur d’académie  pour signifier à l’intéressée qu’aucune décision officielle n’était encore prise, que l’inspecteur avait des entretiens avec ce directeur pour lui suggérer d’accepter de ne plus prendre ce poste en échange d’autres missions, et que les syndicats étaient régulièrement reçus. Promesse a été faite d’ envisager une solution à la CAPD du sur lendemain.
L’inspecteur a refusé de répondre aux deux questions :
Allez-vous prendre la décision de ne pas nommer ce directeur sur cette école ?
Et dans ce cas rétablirez-vous dans son droit, la personne arrivée juste derrière ce directeur en la nommant sur cette école ?

… En juillet, c’est les vacances…,

A la dernière réunion de la CAPD, l’inspecteur n’était pas présent. Le problème n’a pas été évoqué.
La directrice a reçu  son arrêté d’affectation officiel pour une autre école, qu’elle avait demandé en deuxième choix.
Le directeur, lui, a reçu son arrêté d’affectation pour l’école du bassin de la Villette.
L’inspecteur d’académie a déclaré au représentant du syndicat S.E. que :
Il avait reçu le syndicat SNUIPP et que celui-ci ne voulait pas entendre parler de changement d’affectation pour ce directeur.
Il allait convoquer une dernière fois ce directeur pour lui demander de changer son choix, mais que si celui-ci ne voulait pas …, il ne pourrait rien faire.
En résumé :
Des enseignants demandent à être nommés ensemble sur une école au vu d’un projet . On leur répond qu’ils n’ont qu’à faire leur demande, comme tout le monde, c’est à dire individuellement, comme l’exige la loi.
Ils le font pour certains.
Tous n’obtiennent pas leur nomination, ce qui est dans la logique du mouvement.
Un hasard extraordinaire, fait qu’un directeur (soutenu par le syndicat SNUIPP violemment opposé au projet),  à qui son inspecteur d’académie demande au vu de ses « ennuis » de faire son changement dans un certain secteur, désobéit et demande justement l’école où risque d’être nommée une directrice ayant participé au projet.

… En septembre, c’est la rentrée… ,

La veille de la rentrée le directeur nommé est finalement remplacé à 16 heures 30 par un autre.

Le lendemain, jour de rentrée, 340 élèves se présentent pour… 9 classes.
 

… Et maintenant…,

Depuis avril 2002, l’association Déqlic 19 ne s’est plus manifestée, écoeurée qu’elle était du mépris des institutions décisionnaires envers les élèves, les parents, les enseignants.

Elle a fait son deuil forcé du projet qu’elle avait travaillé pendant deux ans.

Pourtant celles et ceux qui étaient contre ce projet continuent à agir de manière souterraine, détournée, en fantasmant  un danger «  Déqlicien » sur cette école.

Ouvrez vos yeux, et voyez de quels gâchis vous êtes responsables, quand vous jouez à la gué-guerre.

Combien d’enfants, de jeunes, d’adultes vous doivent d’avoir été relégués aux confins du monde scolaire, par la force de votre inertie ou l’étendue de votre mépris, envers les publics   que vous accueillez.

Vous faites des discours, votre bouche est pleine de ces beaux mots qui selon vous sont à opposer aux vilains gueux que nous sommes : égalité républicaine, respect des règles et des lois, rigueur, autorité, école de la France, retour aux sources, …

Et pourtant :

Qui détruit lentement mais sûrement, cette égalité, fraternité, liberté, républicaine en laissant quand ce n’est pas en les favorisant se développer des écoles « ghettos » en ne travaillant pas sérieusement à une sectorisation respectant la mixité des origines sociales, culturelles et ethniques ?

Qui bafoue au quotidien les lois de la république en faisant deux poids, deux mesures en fonction des soutiens syndicaux, des pressions de certains parents, de certains enseignants, des pouvoirs discrétionnaires, des vents politiques ?
 

Qui est incapable de maintenir la rigueur dans le
 milieu scolaire en laissant celui-ci se faire attaquer de toutes parts par le libéralisme outrancier ou le repli sécuritaire le plus extrême?

Qui refuse de construire l’école de la France d’aujourd’hui (c’est à dire avec ses composantes d’aujourd’hui), en perpétuant le mythe de l’école républicaine de Jules Ferry qui avait « si bien réussi » ?

Qui ternit l’image de l’autorité en donnant à penser que la seule autorité est celle du pouvoir discrétionnaire et hiérarchique ?

Qui s’obstine à penser et agir avec le fantasme du «enfermons l’école pour la protéger de la société»?

Vous,
toutes celles et tous ceux incapables de prendre des décisions d’ouverture de l’école à ses usagers réels pour en faire les citoyens de demain, alors que vous en avez le pouvoir,

et non pas

Nous,
toutes celles et tous ceux  se battant au quotidien pour penser, construire et agir cette école adaptée à ses publics, futurs citoyens d’une France qui ne nous appartient pas.

Chapitre 2
… une utopie concrète…

Je veux une école où les enfants aient réellement du plaisir à aller.
Qu’ils y aient aussi du désir.
Tout se passe comme si l’école n’était pas là pour accueillir les questions, les interrogations, les expérimentations, les envies des élèves (toutes choses nécessaires à l’apprentissage de quoi que ce soit), mais
qu’elle était là pour contrôler des savoirs supposés acquis.
Si l’on veut apprendre, il faut accepter de ne pas savoir. Or l’école demande avant tout de savoir, quand elle ne reproche pas de ne pas savoir.

C’est la quadrature du cercle. Il ne s’agit là en aucune manière de rejeter la faute sur les enseignants.
Bon nombre d’entre eux font ce qu’ils peuvent avec ce qu’ils sont.
Mais le problème est là justement.
Malgré toutes les recherches, les découvertes de ces 50 dernières années sur l’éducation, malgré les extraordinaires transformations sociales et culturelles des 25 dernières années, l’école avec un grand E en est restée à son âge d’or de l’entre deux guerres.
L’institution Education Nationale ne forme en aucun cas ses futurs enseignants à accueillir les élèves d’aujourd’hui au sein de ses écoles.
Au collège, comme à l’école, comme au lycée (et que dire de l’université), on en est encore à la sacro-sainte didactique des matières. Mais de réflexion et de formation sur la relation pédagogique , point.

Je rêve d’une école qui prenne en compte la réalité des enfants, tels qu’ils sont et non pas tel qu’on suppose qu’ils devraient être.

Je rêve d’une école qui donne envie d’apprendre, qui donne envie d’y être, qui donne envie d’y rester.

Je rêve d’une école où on ne fasse pas la morale aux parents sur leur manière d’éduquer leurs enfants.

Je rêve d’une école lieu ressource de chacun de ses élèves, et non pas seulement d’une minorité normalisée de manière fantasmatique.

Je rêve d’une école qui ait du plaisir à travailler avec ses élèves et qui s’émerveille un peu plus chaque jour de leurs capacités.

Je rêve d’une école qui arrête de se plaindre de ce qui l’entoure, comme étant la cause de  ses malheurs, mais qui travaille plutôt à repenser entièrement son système pour accueillir comme ils le valent bien les élèves d’aujourd’hui.

Je rêve d’une école qui prenne en compte la multiculturalité de la France, non comme un épiphénomène, mais comme une constituante de la société.

Je rêve d’une école qui admette que le modèle  du bon élève qu’elle voudrait  aujourd’hui et autour duquel elle construit son organisation et ses programmes, est un modèle figé hérité d’une histoire ancienne et que de plus ce modèle est fantasmé car il ne fonctionne même plus chez les enfants de la bourgeoisie qui commencent à « péter les plombs » aussi bien que ceux des quartiers dits « Nord ».

Je rêve. Utopies. Oui mais utopies concrètes. Cette école existe.

Dans la tête, dans les écrits, dans les pratiques de certains enseignants.

Pourtant actuellement aucune équipe se déclarant porteuse d’un projet, ne peut être nommée dans une structure de l’Education Nationale, sans passer par les arcanes d’une sorte de « statut innovant » et encore s’agit-il là d’un véritable parcours du combattant qui plus est, très rarement victorieux.

Cette problématique institue et perpétue l’innovation comme un saint Graal qu’on ne peut jamais atteindre.

Quel travail peut naître pour changer cet état de fait ? Peut-on initier un débat de société chargé de remettre en phase notre société et son école ?

Quand je parle de débat, je  ne parle pas de référendum. Un débat, ça s’organise pour que chacun puisse collaborer à la base comme au sommet.
Un débat sur un tel sujet, ça dure longtemps, deux ou trois ans.
L’innovation, mérite d’être reconnue et considérée comme constituante de l’Education Nationale et du service public d’éducation et non comme expérimentation parallèle, en marge et temporaire.

L’innovation, c’est d’abord une question d’état d’esprit avant que d’être une question de méthodes.
Je pense que c’est l’éducation qui doit être active, et qu’il ne sert à rien aux méthodes d’être définies comme étant actives si l’attitude n’y est pas.

Ce n’est pas parce qu’on a un projet et qu’on le dit qu’on a plus à se justifier que ceux qui en ont et ne le disent pas ou  que ceux qui n’en ont pas et se gardent bien de se prononcer.

Je réclame la gestion de la complexité au profit du plus grand nombre et non l’utilisation fluctuante des pouvoirs discrétionnaires en fonctions des opinions des uns et des autres.

Il ne suffit plus de faire fonctionner l’Ecole par la juxtaposition de pratiques plus ou moins concordantes, il nous faut aujourd’hui construire collectivement un milieu éducatif cohérent.

D’autres pédagogies, des « déclics » dans l’Education Nationale, sont possibles.

Je suis attaché à une école publique, créatrice d’humanité, valorisant

· l’estime de soi et des autres,
· la qualité de la vie collective,
· la capacité de tout être humain à progresser,
· le travail en équipe,
· la relation effective avec les acteurs sociaux et culturels du quartier, mais aussi d’un environnement plus large.

J’ai en commun avec d’autres de penser que l’éducation constitue un moyen essentiel d’émancipation des personnes face  à un avenir de plus en plus menaçant .

Je sais que les pratiques d’Education Nouvelle ne relèvent pas de l’utopie et qu’elles croisent les aspirations formulées ou non des enfants et des adolescents ainsi que celles croissantes des familles et des enseignants.

Je constate que ces pratiques se heurtent à la complexité d’un système éducatif, qui ne sait plus prendre en compte la réalité de ses forces vives, élèves, familles, enseignants, et déplore les incohérences politiques qui président à cet état de fait.

Les missions de l’Ecole, sont aujourd’hui à redéfinir collectivement dans un véritable travail de concertation, mais j’affirme que les apprentissages -première mission de l’école- quels qu’ils soient et quels que soient les âges, sont favorisés par des pédagogies prenant en compte à la fois,

· les individus comme des personnes à part entière capables de choisir , de réfléchir, d’agir, d’essayer, de transformer, de se tromper, de recommencer, de réussir, …
· les individus comme porteurs de richesses originales de cultures,
· les individus comme étant tous semblables, mais aussi tous différents,

Cela signifie des mises en œuvre,

· de tâtonnement expérimentaux,
· d’expressions libres,
· de créations par la pratique et la valorisation de tous les langages : oral / écrit, artistique / scientifique intellectuel / corporel,
· de communications en réseaux internes ou externes,
· d’apprentissage de « la citoyenneté » par la pratique d’une vie coopérative instituée et instituante (propositions, choix, projets, décisions, bilans, …),
· de personnalisation des apprentissages à l’aide d’outils appropriés et d’une organisation cohérente du temps et de l’espace,
· de construction des connaissances en inter-action avec ses pairs et avec les enseignants,
· d’évaluations formatives et socialisées.

Dans les réflexions et les pratiques de certains enseignants, est accordée une place privilégiée à la notion de cycles d’apprentissage (tels que définis dans les programmes de l’Ecole Primaire) qui permet de ne plus mélanger les « classes » d’âge et les « classes » d’apprentissages, et de différencier ainsi les parcours des élèves selon des progressions qui leur sont propres, pour les amener au niveau réclamé en fin de cycle.
Ainsi chaque élève a réellement  trois années pour s’approprier un ensemble de notions sans être étiqueté « en retard » du fait d’une progression non conforme à celle d’un groupe supposé être la norme.

Cela peut tout changer.

Beaucoup de personnes, mettent en place au quotidien des pratiques inspirées des valeurs exposées plus haut, au sein de leurs classes. Ils se heurtent souvent aux limites du « travail  isolé ».

Beaucoup de projets se construisent dans la collaboration et se retrouvent sans effets, faute d’une reconnaissance officielle.

Des documents faisant état de ces réflexions et de ces pratiques existent par centaines.
Ils ont souvent été à l’origine de transformations du système éducatif, mais rarement leurs auteurs ont été reconnus par ce même système.
Cela serait un moindre mal si cette non reconnaissance ne s’accompagnait de suspicions d’amateurisme ou de non validité de ces pédagogies «innovantes» au regard de celles plus «traditionnelles».

L’Ecole n’évaluant que les résultats obtenus dans l’immédiateté de l’enseignement, sans évaluer aussi la manière dont les personnes vont se servir de leurs acquisitions, aucune analyse des incidences de ces éducations différentes, sur les adultes que sont devenus les élèves n’a jamais été tentée.

Ce serait pourtant le seul moyen de juger de leurs réalités respectives.

Toutefois, Il serait illusoire d’espérer transformer, du jour au lendemain, tout un système scolaire.

Il faut donc trouver une nouvelle logique et prendre le problème différemment en s’appuyant sur les nombreuses pratiques démontrant qu’il est possible de travailler autrement au sein de l’Education Nationale, en osant avoir une réflexion commune à tous les partenaires concernés.

Le Conseil National pour l’Innovation et la Réussite Scolaire (CNIRS) a été mis en place par le ministère de l’Education Nationale pour permettre des avancées.
C’est pourquoi toute initiative, à la condition qu’elle reste dans le cadre d’une école publique (portant les valeurs de la mission de service public d’enseignement), laïque (au service de tous les élèves, de chacun d’entre eux) et républicaine (dans le cadre de lois nationales garantes des valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité), doit être encouragée, respectée, mise au travail.

Aujourd’hui, dans le secteur du bassin de La Villette, les ingrédients étaient réunis pour mettre en route une nouvelle école, en phase avec la réalité de son environnement : mélange des cultures, mixité des origines, diversité sociale, mobilisation de parents, d’enseignants, de citoyens.

Il aurait dépendu alors de tous que l’école du quai de la Loire soit une chance pour ses futurs élèves. Quand je dis école du quai de la Loire, ce que je dis est valable pour toutes les autres écoles du quartier. Mais c’est celle-là qui devait ouvrir en septembre 2002.

Le projet déqlic 19, initié par des habitants du quartier du bassin de la Villette et des enseignants de l’éducation nationale, avait simplement  pour objectifs qu’une équipe d’enseignants de l’éducation nationale puisse construire un projet sur une école primaire du début de la maternelle à la fin de l’élémentaire, d’une part pour faire fonctionner au mieux la loi d’orientation sur les cycles en vigueur dans les textes de l’éducation nationale depuis 1989,
et d’autre part, pour y travailler à partir de pratiques pédagogiques éprouvées,

pratiques développant le sens de l’initiative et des responsabilités, l’autonomie, l’aptitude à communiquer, à travailler et à faire avec d’autres…,
pratiques aidant les enfants à établir des règles de vie collective en partant des lois qui fondent l’humanité,
pratiques acceptant chaque enfant tel qu’il arrive à l’école, porteur de son histoire,
pratiques mettant en place à l’intérieur de l’école un cadre physique, social et humain sécurisant à la dimension des possibilités de chaque enfant,
pratiques reconnaissant et valorisant les réussites multiples et diverses des élèves.

Déqlic19 voulait une école qui apprenne à apprendre,
qui apprenne à connaître, à donner sens au monde et à en maîtriser ses mécanismes,
une école de l’estime de soi et du respect des autres,
une école de quartier, sectorisée,  lieu ressource pour l’ensemble de ses habitants.

En tout cela l’association se situait dans le cadre des programmes de l’Education Nationale.
Sa seule différence, était qu ‘elle voulait la faire dans un projet concerté, au niveau de toute une école.

Les murs de cette école existaient.
Des enseignants de l’éducation nationale, tous volontaires, étaient prêts à être nommés sur l’école et à construire leur projet d’école.

Le projet était soutenu officiellement par le C.N.I.R.S.

Le contenu de ce projet avait été jugé digne d’intérêt par les autorités académiques de l’Education Nationale, ainsi que par plusieurs syndicats d’enseignants.
L’adjoint au maire de Paris, en charge de la vie scolaire, reconnaissait l’intérêt du projet et  proposait que les personnels municipaux nommés sur l’école, le soient en connaissance de cause.

Pourtant, au jour d’aujourd’hui, pour des raisons de règles d’organisation de nominations des enseignants, ce projet n’a pu voir le jour.
Déqlic19 ne contestait pas ces règles en tant que telles. L’association pointait seulement le fait qu’appliquées de manière exclusive, elles n’ouvraient pas la possibilité d’organiser de manière dynamique, la progression de la recherche pédagogique.

L’exclusion, la violence, la peur, l’échec, sont trop présents dans l’école aujourd’hui.
Des écoles de « la deuxième chance », comme on les nomme, sont mises en place pour réparer les dégâts.

Déqlic19 ne voulait plus réparer les dégâts.
Déqlic19 voulait agir en amont. Ce que les personnes de l’association voulaient c’étaient des écoles de «la première chance».

Et Déqlic19 demandait que cette école de « la première chance » reçoive des autorités de tutelles qui la reconnaissaient les moyens techniques nécessaires à son ouverture,

parce que,  ce qu’elle proposait comme contenu et formes de travail rentrait parfaitement dans le cadre légal,
parce que, les enfants du bassin de la Villette, comme ceux du XIXème, comme ceux de Paris, comme ceux de toute la France, comme ceux de partout dans le monde, avaient droit à ce qu’on leur offre tous les moyens possibles de la réussite, et qu’on ne pouvait leur refuser au prétexte que les adultes n’arrivaient pas à se mettre d’accord,
Parce qu’il valait mieux prévenir que guérir, construire que réparer, choisir que renoncer, agir que constater, avancer que stagner.

Votre appui était indispensable.

Vous avez pris la responsabilité d’en décider autrement.

Alors, vous avez raison.
Prendre une décision politique qui aurait risqué d’avoir des effets immédiats sur  la situation de crise dans laquelle se situe la société aujourd’hui n’est pas une bonne solution.
Il valait mieux attendre.

Vous avez raison.
Vous n’êtes pas encore prêts.

Pour qu’il puisse y avoir décision politique, il aurait fallu que chaque personne y participant, soit convaincue préalablement que son « pré carré » était  moins à défendre que celui des citoyens qu’il représentait.

Vous avez raison.
Pour le moment vous en êtes à penser que ce qui doit changer, c’est l’autre.
Tout doit changer à condition … que rien ne bouge.

Vous avez raison.
Les acteurs de l’école, élèves, enseignants, parents, sont en détresse.
Et bien qu’ils aient besoin d’aide, vous préférez rester dans de mesquins débats politiciens ou technicistes, quitte à énoncer des contre-vérités, pour la seule satisfaction d’user de votre pouvoir discrétionnaire.

C’est ainsi que des parents continueront à se défier de plus en plus de cette Ecole qui se défie d’eux et, soit inventeront des stratégies sélectives d’évitement ( privé, dérogations à la carte scolaire, affrontements, …), soit s’enfonceront dans une culpabilité destructrice.
C’est ainsi que des enseignants continueront à s’arquebouter au fantasme d’une « école d’autrefois » qui fonctionnait si bien, pendant que d’autres « rameront » désespérément seuls dans leur volonté inaltérable de quand même faire quelque chose.
C’est ainsi que des élèves continueront à rejeter ou mépriser ce que l’Ecole valorise (au moins autant que l’Ecole ignore et stigmatise leur culture), ou bien joueront le jeu parce que c’est « utile ».

Et le monde tournera.
Vous pourrez vaquer à vos occupations en dénonçant celles et ceux qui avant vous n’ont pas su prendre les bonnes décisions.

Vous avez raison.
Il vaut mieux ne pas se précipiter. L’urgence n’est pas si grande.

Il n’y a pas encore de morts.
Ou si peu.

Alors continuez d’avoir raison.

Paris, septembre 2002.
Michel HIRTZ,
Parent d’élèves
ancien président de l’association Déqlic19,
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