LIBÉRER L'ÉCOLE DE LA PUB
Paul ARIES

Les enfants chair à pub pour les guerres économiques ?
Touche pas à mon école !

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pour 35 cents (28 cents d'euro) de l'heure.

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D'ÉDUCATION
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Rapporté par la newsletter de ATTAC :

"  J'ai acheté il y a quelques mois une paire de baskets Nike chez Décathlon.

Quelle n'a pas été ma surprise de lire sur les étiquettes de mes chaussures,que le pied droit est fabriqué en Chine, et le pied gauche au Vietnam.

Pensant à un erreur d'étiquetage, je suis allé me renseigner auprès du vendeur.

Il n'y a aucune erreur.

Pour éviter qu'une usine de sous-traitance ne fabrique un nombre de chaussures plus important que le nombre commandé pour les écouler sur le marché noir, Nike fait fabriquer les pieds gauches dans un pays et les pieds droits dans un autre pays.

Des fois que les ouvriers de leurs usines aient envie de porter des Nike - que leurs salaires ne leur permettent pas de s'acheter - il ne pourraient chausser qu'un seul pied. "
 

Autre petite histoire libérale.

Grâce à la mondialisation (libérale) nous connaissons une période où les libertés et la démocratie, en même temps que le bien être physique n'ont jamais été aussi excellents. L'épanouissement de chacun est l' une des valeurs essentielles sur laquelle se base avant tout le développement des grandes sociétés multinationales, des centres commerciaux, de l'industrie du divertissement. Le garant suprême de cette valeur essentielle est bien entendu la libre entreprise autre avatar de la liberté d'expression si chère aux cours libéraux.

Je m'appelle Jonah H. Peretti et aujourd'hui j'ai décidé de m'acheter des chaussures de sport. " Just do it " ! et justement Nike me propose de fabriquer mes propres chaussures que je peux par ailleurs personnaliser en y faisant inscrire ce que je veux. C'est un service de Nike " pour la liberté de choisir et la liberté d'exprimer qui je suis " : Nike iD. www.nike.com

Bien entendu, il y a quelques restrictions compréhensibles. On ne peut pas écrire n'importe quoi. J'y ai particulièrement fait attention. J'ai rempli le formulaire, choisi les couleurs, j'ai envoyé le mot que j'aimerais voir écrit sur mes chaussures. J'ai payé, 50 dollars.

Quelle ne fut pas ma surprise de recevoir de nikeid_personalize@nike.com en réponse à ma commande o16468000 que ma personnalisation avait été refusée. A cela quatre raisons possibles que le courrier électronique m'énumère :

- Votre personnalisation contient le nom d'une autre société ou un nom déposé.
- Votre personnalisation contient le nom d'un athlète ou d'une équipe que nous n'avons pas le droit légal d'utiliser.
- Votre personnalisation a été laissée vide. Êtes vous certain de ne pas vouloir de personnalisation ?
- Votre personnalisation contient des insanités ou des termes d'argot inappropriés pour lesquels du reste votre mère pourrait vous donner la fessée.
Hum ?

Ma commande a été annulée, leur écrivis-je, mais ma personnalisation ne violait aucun des critères que vous avanciez dans votre courrier électronique. Le terme avec lequel je souhaitais personnaliser mes ZOOM XC USA était " sweatshop "

Sweatshop n'est pas :
- une autre marque
- le nom d'un athlète
- [rien du tout]
- un terme injurieux.
J'ai choisi cette personnalisation parce que je voulais rendre hommage aux labeurs des enfants qui ont fabriqué mes chaussures.
Merci donc de me les envoyer immédiatement.

La réponse Nike ne se fait pas attendre. Cependant rappelons que " Sweatshop " désigne en anglais une entreprise délocalisée dans un pays du Sud pour raison de dumping social et qui emploie à bas prix une main d'oeuvre, souvent des enfants, corvéables à merci. (petite note du rédacteur) Reprenons maintenant la petite histoire libérale où nous l'avions laissée.

Votre personnalisation a été refusée parce qu'elle contenait comme nous vous le disions dans notre courrier précédent un terme injurieux inapproprié. Si vous souhaitez commander de nouveau nos chaussures avec une nouvelle personnalisation merci de visiter www.nike.com

Je réponds de suite. Merci de votre réponse rapide au sujet des mes chaussures ZOOM XC USA. Je trouve votre service après-vente très efficace mais je suis en désaccord avec votre appréciation " terme injurieux inapproprié ". Après avoir consulté le Webster (Larousse en français ou Robert comme on voudra) j'ai découvert que
" sweatshop " fait partie du langage courant et n'est pas de l'argot. Le terme désigne
" un magasin ou une fabrique dans laquelle les employés travaillent de longues heures et dans de mauvaises conditions sanitaires ", il date du reste de 1892.
En conséquence ma personnalisation ne correspond en aucune façon aux critères de refus que vous m'avez énoncés. J'espère donc que conformément à vos slogans vous valoriserez ma liberté d'expression et que vous reconsidérerez votre décision de ne pas donner suite à ma commande.

Nike :

Pour ce qui concerne les règles de personnalisation il est dit sur le site NIKE iD que Nike se réserve le droit d'annuler toute personnalisation sous 24h. Du reste il ajoute que si nous honorons la plupart des commandes de personnalisation, nous ne pouvons les honorer toutes. Certaines peuvent contenir des références ou être d'autres marques déposées, ou bien encore les noms de certaines équipes de sport professionnelles, de certains athlètes ou célébrités que Nike n'a pas le droit d'utiliser. D'autres enfin peuvent contenir des termes que nous jugeons inappropriés ou plus simplement que nous ne souhaitons pas voir sur nos produits. Dans tous les cas nous vous ferons savoir si nous n'acceptons pas votre personnalisation et nous vous offrirons alors une chance de nous en soumettre une nouvelle.

Et puis moi, et puis eux ; moi, eux ; moi, eux. lui, eux.
Du reste Jonah finit par les remercier très chaleureusement de l'énergie qu'ils déploient et leur demande une dernière faveur :
Serait-il possible de m'envoyer une photo couleur de la petite vietnamienne de dix ans qui a fabriqué mes chaussures?

Cette petite histoire libérale est tirée d'un échange de courriers électroniques réels entre Jonah H Peretti et Nike, que m'a fait parvenir une troisième personne, Andy Banks, que je remercie.

Laurent Jésover, rédacteur journal@attac.org

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