| Appel
pour des éts innovants et coopératifs |
Paris,
capitale du contournement de la "carte scolaire"
"Il faudra bien un jour
poser clairement la question de savoir
pourquoi la sectorisation
est à ce point insupportable à certaines familles" ,
insistaient les inspections
générales de l'éducation nationale dans un rapport
sur Paris réalisé en 2004
Depuis, aucune
réflexion précise n'a été lancée ni
même évoquée.
"La
question de la carte scolaire ne peut pas se régler uniquement à
travers la question de l'Ecole
parce
que cela renvoie à toute la politique de la ville, du logement social:
quand
on a des ghettos urbains, on a aussi des ghettos scolaires"
L'enjeu n'est donc pas de savoir si
l'on est pour ou contre la carte scolaire,
tant il est évident qu'elle
couvre de grandes injustices,
mais
il est de savoir ce que l'on fait après.
Et
là ...
La
carte scolaire ne suffit pas, à elle seule, à favoriser
la mixité sociale
ni
à assurer, simplement, l'égalité des chances devant
l'école.
Faute
d'avoir développé des politiques de la ville et de la banlieue
ambitieuses,
les
gouvernements de droite et de gauche
ont
laissé s'accentuer des inégalités entre territoires,
qui
pèsent lourdement sur les établissements scolaires.
Paris,
capitale du contournement de la "carte scolaire"
"Il faudra bien un jour
poser clairement la question de savoir
pourquoi la sectorisation
est à ce point insupportable à certaines familles" ,
insistaient les inspections
générales de l'éducation nationale dans un rapport
sur Paris réalisé en 2004
Depuis, aucune
réflexion précise n'a été lancée ni
même évoquée.
Médiocres
résultats de la maternelle au lycée et aggravation des inégalités
Paris,
mauvais élève pour l'Éducation nationale
Les dérives
commenceraient dès l'école maternelle avec des ouvertures
parfois tardives le matin
et surtout
une absence des élèves le samedi matin qui ne serait pas
que du fait des familles.
L'école
à Paris : une
machine à creuser les inégalités
"Dès
l'école maternelle, se met en place l'approche élitiste qui
mène à ces résultats"
L'hypocrisie
de la carte scolaire
En effet, on s'est vite aperçu
que la liberté de choix
n'était effective que pour une
minorité de parents,
dans la mesure où tous les voeux
se portaient sur les mêmes établissements.
Comment
les parents d'élèves
[ ceux qui le peuvent ! ]
contournent
la carte scolaire
Suppression de la carte scolaire:
--afp----200607--Les parents d'élèves FCPE de Paris, où la désectorisation est déjà en vigueur pour l'entrée en lycée, ont dénoncé mercredi la décision du gouvernement d'appliquer ce modèle de "tri des élèves" aux collèges. "A Paris, la désectorisation amène une inégalité d'accès, une aggravation des inégalités socio-culturelles, un tri en fonction des notes et non l'inverse comme on nous dit, ça n'amène pas une amélioration de la mixité sociale, ni une amélioration de la qualité !", s'est insurgé Michel Samgan, président de la FCPE Paris, lors d'une conférence de presse. La fédération de parents, très engagée à gauche, a raconté comment se déroulait à Paris "le marché aux élèves", la commission d'affectation où chaque année les proviseurs choisissent les élèves qu'ils vont accueillir en seconde générale, la plupart du temps en fonction de leurs notes. Les chefs d'établissement sont obligés de respecter les choix d'options, de langues, le maximum de 10% d'élèves hors de leur district - Paris est découpé en quatre districts - mais aussi de conserver des places pour les 3e et 4e voeux formulés par les familles, mais "il y a une absence totale de règles, c'est du chacun pour soi, il n'y a pas de critères communs définis et pilotés par l'académie", a regretté M. Samgan. En tout, dix à 12.000 dossiers sont examinés chaque année dans la capitale. La décision d'assouplir la carte scolaire sur tout le territoire et de la supprimer dans un délai de trois ans est "une opération de manipulation, une immense arnaque, c'est un mensonge de faire croire que les familles vont choisir leur établissement !", a estimé le président de la FCPE-Paris.
Malgré un rapport officiel accablant, les affectations restent le fait du prince. Quand les proviseurs parisiens font le marché aux bons élèves Par Emmanuel DAVIDENKOFF - samedi 02 juillet 2005 -
Liberation
Ça a commencé dans les derniers jours de juin. Un premier coup de fil, puis deux, puis cinq... Ce sont des parents d'élèves parisiens. Leur histoire varie peu : leur enfant, sortant de collège, n'a pas été affecté dans le lycée de leur choix, voire se trouve sans affectation, avec une probabilité élevée d'être envoyé dans un des lycées les moins cotés de la capitale. Que faire ? «Pleurer», répond, sans ironie, une proviseure qui voit défiler ces parents depuis une semaine. Implacable Pleurer, donc. De rage et... d'impuissance : les recours sont quasiment inopérants. L'affectation des collégiens en lycée se joue selon un système de «libre concurrence» entre établissements, «contraire à l'esprit et aux textes régissant le service public», dixit un rapport explosif des Inspections générales de l'Education nationale révélé en son temps par Libération (1). Rapport sans effet : cette année encore, les lois implacables du marché scolaire parisien ont triomphé. La demi-douzaine de proviseurs interrogés est unanime : le système n'est pas satisfaisant. Tout a commencé le lundi 20 juin dans les sous-sols du rectorat, avenue Gambetta. C'est là, dans quatre salles, que les proviseurs des 75 lycées publics parisiens viennent faire leur marché parmi les 11 900 élèves de 3e admis à passer en seconde. Deux sont absents : ceux d'Henri-IV et Louis-le-Grand, qui, trois jours plus tôt, ont fait leur marché en avant-première. L'exception se veut vertueuse : il s'agit de ne pas pénaliser les excellents élèves qui ont émis pour premier voeu un de ces deux lycées, mais qui ont été grillés par plus excellents qu'eux. Leurs dossiers ne seront pas mis de côté mais réintégrés dans le vivier. Le tout-venant ne profite pas de cette mansuétude : ceux qui réclament un lycée au-dessus de leurs cordes le paient même très cher. Pourquoi ? Revenons dans notre sous-sol. Chaque proviseur trouve sur sa table un carton rempli de demandes d'inscriptions émises par des familles ayant placé son lycée en «1er choix» (sur 4 choix). Les demandes sont généralement triées par collèges. Se trouve aussi une première chemise, à part, qui recèle les demandes d'élèves venant du privé (mauvais départ : certains proviseurs ne l'ouvrent même pas). Une autre contient les «interventions» en clair : les passe-droits obtenus auprès du ministre ou du recteur par des politiques, journalistes, médecins, enseignants, etc. Si vous êtes proviseur d'un lycée réputé, vous trouverez nettement plus de demandes que vous n'avez d'offres Théoriquement, vous devrez choisir 90 % au minimum d'élèves issus de collèges de votre district (Paris est découpé en quatre districts). Les 10 % restants peuvent venir d'ailleurs. L'inspecteur d'académie et les représentants des fédérations de parents d'élèves ont beau circuler dans les salles, vous faites ce que vous voulez : «C'est le souk», brocarde une proviseure ; une autre assume : «On fait notre marché en fonction des notes et on a intérêt à le dire aux élèves de 3e : ça les motive.» Vivier Mais la concurrence est faussée. Ainsi, certains pratiquent, en toute illégalité, des prérecrutements cela va du proviseur qui a expliqué à une famille comment remplir le dossier pour optimiser ses chances jusqu'à celui qui répond par écrit à la famille qu'il acceptera un enfant (commentaire d'un proviseur : «Ecrire, c'est quand même kamikaze : les prérecrutements sont interdits»). D'autres privilégient un nombre restreint de collèges de leur district, au risque d'appauvrir le vivier des autres collèges. D'autres dépassent le seuil admis de 10 % d'élèves hors district. D'autres, quand ils sont à la tête d'une cité scolaire (collège + lycée), privilégient les élèves de leur propre collège. Plus couramment, et tout à fait légalement, les proviseurs trient en fonction des notes, appréciations des principaux, choix d'options... «Tout est question de déontologie : vous pouvez jouer le jeu de la mixité scolaire, on ne vous en saura pas gré», explique un proviseur. D'autant que la pression vient parfois des enseignants. Le proviseur d'un lycée très demandé : «Non seulement il faut que je convainque certains enseignants que la mixité scolaire a du bon, mais je ne peux le faire qu'à petite dose. De toute façon, si je voulais recruter du jour au lendemain un tiers d'élèves très moyens, la structure du lycée ne saurait pas faire. Nos enseignants sont habitués à travailler avec des très bons... On ne peut rien faire évoluer en un jour.» Une de ses collègues, d'un lycée de bon niveau : «C'est le système qui est pourri, pas les gens. Nous sommes pris dans des alternatives qui laissent peu de marges...» Fin du premier tour et début du second : les milliers d'élèves qui n'ont pas été retenus par la quinzaine de lycées les plus cotés sont proposés aux autres. Problème : à ce moment de l'histoire, les établissements les plus demandés ont fait le plein. C'est au tour des lycées «corrects sans plus» de se servir. Les familles qui ont compris qu'il ne fallait pas être trop gourmand et se contenter, dès le 2e choix, d'un établissement moyen ont encore leurs chances. Mais celles qui ont demandé en deuxième choix un lycée d'excellence sont dans les choux. Pendant tout ce temps, si vous êtes proviseur d'un lycée moins coté, vous êtes «condamné» à prendre tous les dossiers de votre carton. Et à attendre. Dans les cas les plus extrêmes, vous n'avez rempli que 30 % de vos effectifs (cette année, un des lycées queue de peloton n'aurait été coché en premier choix que par 26 élèves... pour 130 places disponibles). Mais vous allez maintenant entrer en lice. Réputation Il reste certes à examiner les 3e et 4e voeux, mais seule une poignée de lycées n'ont pas, à cette heure, fait le plein, et généralement ils n'ont quasiment pas été demandés. Ainsi, chaque année, environ 5 % des élèves seront envoyés d'office dans un de ces lycées dont la réputation fait frémir les familles et parmi eux nombre d'élèves dont le niveau est correct. Proviseur d'un lycée peu coté, vous vous réjouissez : le niveau de votre lycée va augmenter ! Vous allez confirmer ce que toutes les études montrent : à partir d'un certain degré de mixité scolaire, les meilleurs entraînent les moyens qui entraînent les mauvais et tout le monde y trouve son compte ! Patatras. C'est là que les téléphones de tout ce que Paris compte de personnes d'influence dans le domaine de l'éducation sonnent. Quand le dossier de l'élève est bon, on tente sa chance dans le privé. Ou on fait jouer le piston que l'on n'a pas activé jusqu'alors, par souci de morale républicaine ou parce qu'on avait mésestimé la rudesse du processus. Les rares bons élèves que les lycées mal cotés pouvaient espérer récupérer s'évaporent. Vertus Résultat : cette «démarche sélective assure aux lycées bénéficiaires d'une cote confortable le renforcement de celle-ci, et condamne, à l'inverse, les établissements délaissés à s'enfoncer dans leur mise à l'écart», dénonce le rapport des Inspections générales. Le phénomène se serait même aggravé : la «pression», qui se répartissait avant sur une quinzaine de lycées se concentre de plus en plus sur moins de dix établissements.Longtemps, l'académie de Paris a défendu les vertus du système en insistant sur le fait que 85 à 90 % des élèves sont affectés dans un lycée qu'ils ont placé en premier ou en deuxième choix. Argument fallacieux, selon les Inspections : «Si ce phénomène contribue à l'acceptation du système, il en accentue en réalité les effets.» Car les stratégies des familles varient, de même que les politiques des chefs d'établissement. Le proviseur d'un lycée coté dénonce : «Une partie du tri se fait sans que nous ayons à intervenir, via la censure qu'imposent, de fait, certains principaux de collège, quand ils découragent une famille de demander un lycée trop coté ; ou via l'autocensure des familles qui, certaines que leur enfant n'accédera pas à un lycée d'élite, émettent des demandes plus modestes». Aujourd'hui, Didier Jouault, Inspecteur d'académie de Paris, plaide pour une réforme mais affirme «ne pas avoir trouvé l'alchimie idéale avec les parents et les chefs d'établissement». Il promet de continuer à chercher «dès la rentrée». Principal obstacle : «Les représentations symboliques des parents», qui figent la hiérarchie des lycées. Un proviseur qui a quitté un collège moyen pour un fleuron parisien confirme : «Dans mon précédent établissement, les parents m'interrogeaient sur mon taux de réussite au bac. Maintenant, on me pose des questions sur le nombre de bacheliers que nous "casons" en prépa pour ces familles, le bac n'est qu'une formalité». L'élitisme trouve peut-être son compte dans ce système. Mais pas l'excellence : Paris affiche un taux de réussite au bac médiocre (83,5 %), du moins si on le rapporte au profil des élèves. Le prix du bûcher des vanités scolaires. (1) Le 25 octobre 2004. Rapport accessible sur www.education.gouv.fr/syst/igaen/rapports.htm |