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Environnement.
Dans le Kerala, une usine est accusée d'assécher les nappes phréatiques.
En Inde,
le Coca donne soif aux paysans

Par Pierre PRAKASH - jeudi 22 avril 2004 - Libération
Plachimada (Kerala, Inde) envoyé spécial

«L'eau pure, l'air pur : notre droit de naissance», dit le petit écriteau à l'entrée de l'usine Coca-Cola. Sous une hutte en paille, une quinzaine d'hommes et de femmes, assommés par la chaleur, montent la garde. «Nous en sommes à notre 705e jour de protestation, explique l'un d'entre eux. Nous nous relayons pour être là en permanence. Nous ne quitterons pas cette cabane tant que l'usine n'aura pas définitivement fermé.» Bienvenue à Plachimada, petit hameau de l'Etat du Kerala, dans le sud de l'Inde, où une poignée de paysans luttent avec acharnement contre la plus connue des multinationales, accusée de piller les eaux souterraines en fabriquant ses célèbres boissons gazeuses. Un «David contre Goliath» version écolo-altermondialiste, dans lequel le plus petit, pour l'instant, l'emporte. Mettant temporairement fin au bras de fer, la haute cour du Kerala a en effet validé début mars la décision du gouvernement local de fermer le site jusqu'à l'arrivée de la mousson, afin de laisser le temps aux nappes phréatiques de se remplir. Estimant que les ressources aquifères étaient une «propriété publique» à laquelle «tous les êtres humains» pouvaient prétendre, ce tribunal avait déjà ordonné à Coca, en décembre, de limiter sa consommation d'eau au minimum, soit l'équivalent de ce que pomperait une exploitation agricole de 15 hectares, la taille du terrain qui abrite l'usine.

«Or bleu». Car, dans cette région autrefois connue comme le «grenier à riz» du Kerala, l'«or bleu» manque cruellement. A tel point que les autorités sont obligées d'envoyer des camions-citernes pour approvisionner les villageois en eau potable. «Le camion ne vient au mieux que tous les deux jours, et quand il est là, la bagarre est telle que nous n'avons jamais assez d'eau pour toute la famille», se lamente Kalipan en désignant une flopée d'enfants qui jouent dans la poussière. «Avant, je faisais tourner ma pompe toute la nuit, ajoute Krishnaswami, un agriculteur dont les terres jouxtent l'usine. Aujourd'hui, il n'y a plus d'eau au bout de deux heures. J'ai été obligé d'abandonner les rizières pour ne faire que de la noix de coco. Mes revenus ont tellement chuté que j'ai dû me débarrasser de tous mes employés.» «Avant, il y avait deux récoltes de riz par an, ce qui nous assurait six ou sept mois de travail, explique un saisonnier. Maintenant, nous avons de la chance si nous arrivons à toucher trois mois de salaire. Cette usine nous a volé nos emplois.»

Devenue un symbole de la lutte contre l'exploitation commerciale de l'eau, la bataille de Plachimada dure depuis deux ans. Montré du doigt par les écologistes et les altermondialistes de tous bords, Coca-Cola affirme n'être pour rien dans l'épuisement des nappes phréatiques, rejetant la faute sur la sécheresse. De fait, les précipitations dans la région ont été bien en dessous de la moyenne ces deux dernières années. «Nous avons connu d'autres sécheresses par le passé, mais la situation n'a jamais été aussi dramatique, nous avions au moins de quoi boire, rétorque Aruchami Krishnan, le président du conseil des villages de Purumatty, dont Plachimada fait partie. Et même si la mousson est seule responsable, la présence de l'usine ne peut de toute façon qu'aggraver les choses.»

En vertu de l'accord signé avec les autorités locales lors de l'ouverture de l'usine, en 2000, Coca-Cola a le droit de pomper 560 000 litres par jour. La compagnie affirme être en dessous de ce seuil, déclaration invérifiable puisque les huit puits du site n'étaient pas, jusqu'à peu, équipés de compteurs. Insistant sur le fait que l'usine est dotée du label écologique ISO 14 001, Coca met aussi en avant la mise en place d'un important dispositif de récupération d'eau de pluie qui aurait déjà permis de renflouer les nappes de 12 millions de litres. «Le système a été conçu après le début de la polémique, sourit toutefois un journaliste qui suit le dossier depuis le début. Ça ressemble surtout à un exercice de relations publiques.» Le groupe, lui, affirme que le système faisait partie des plans de l'usine dès son origine... Mystère, mais le label ISO 14 001 ne date que d'avril 2003.

«Antiaméricanisme». Catastrophique pour l'image du géant mondial des boissons gazeuses, la polémique de Plachimada a été aggravée, l'an dernier, par la découverte de métaux lourds dans les déchets de l'usine, que la direction distribuait gratuitement comme engrais aux paysans des alentours... Résultat : des taux élevés de plomb et de cadmium dans les puits, dans les champs, et donc dans la chaîne alimentaire, avec des conséquences inconnues sur la santé. A sa décharge, Coca a immédiatement rapatrié les «engrais» non utilisés, mais maintient pour autant que ceux-ci sont inoffensifs. Bizarrement, les analyses diffèrent, mais les soupçons sont néanmoins lourds, d'autant qu'une autre usine sous-traitante a confirmé la présence de ces substances toxiques. Les habitants de Plachimada, en tout cas, affirment tous souffrir de démangeaisons lorsqu'ils se lavent avec l'eau des puits.
Réfutant toutes les accusations, Coke se dit victime de «règlements de comptes politiques et d'antiaméricanisme». «Il est difficile de comprendre pourquoi nous sommes les seuls à être pris pour cible alors qu'il y a dans la région vingt-sept autres industries qui utilisent pour certaines plus d'eau que nous», argumente Sunil Gupta, vice-président de Coca-Cola India. «C'est vrai que la focalisation sur Coca est un peu injuste, avoue un journaliste local, mais ils payent le prix de leur nom et leur implantation dans une zone agricole alors que les autres usines sont regroupées dans des sites industriels.»

Grand seigneur, Coke affirme ne pas vouloir fermer l'usine «car elle génère des revenus indispensables pour des milliers de locaux». Cinq cents familles, en l'occurrence, qui sont évidemment furieuses d'avoir soudainement perdu leur gagne-pain. Devant l'usine, la cabane du Comité de lutte anti-Coca-Cola fait ainsi face depuis un mois et demi à celle du Comité de protection des emplois Coca-Cola. «Les anti sont justes frustrés de n'avoir pas été embauchés», affirment ces derniers. «Le droit à la vie est supérieur à la sécurité de l'emploi», rétorquent leurs adversaires.


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