alternatives éducatives : des écoles, collèges et lycées différents
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I Obligation scolaire et liberté I Des écoles différentes ? Oui, mais ... pas trop ! Appel pour des éts innovants et coopératifs |
 

TOUS COLLÉS !
Fillon rétablit la punition collective à l'école
La dernière circulaire de l'Éducation nationale, parue hier au Bulletin officiel du ministère, fait bondir les syndicats de parents d'élèves.
Le texte que dénoncent les deux principales fédérations, la FCPE et la PEEP,
remet en selle la «sanction collective» officiellement bannie des principes de l'Éducation depuis plusieurs années.

 Ecole: des sanctions sans appel à la pelle

L'humiliation des élèves, reflet des carences pédagogiques françaises
L'humiliation des élèves va souvent de pair avec une méconnaissance de leurs droits,
pourtant renforcés par un décret de juillet 2000.
Et les règlements intérieurs des établissements scolaires se déclinent surtout en termes d'obligations, constate Pierre Merle.

Élèves décrocheurs, décrochés, découragés, révoltés...
120.000 collègiens casqués,
150.000 appareillés,
330.000 humiliés publiquement...
...1.890.000 mastiqueurs-ruminants...
(sur une population d'environ 3 millions de "collègiens")
 
 

Californie : Près d'un lycéen sur 4 "décroche" entre 15 et 18 ans

(rapport du State Department of Education - 7 juillet 2008)

Académie de Créteil - Rentrée 2008-2009
Pour les décrocheurs- ou déjà "décrochés" - de plus de 16 ans :
une annexe (3 classes d'une douzaine d'élèves)
au lycée polyvalent Jean Macé de Vitry sur Seine 

Education. Pierre Merle, sociologue, regrette que les classes soient souvent des zones de non-droit : 
« Humilier, une forme d’autorité très usitée »

Libération - lundi 20 juin 2005
Pour Pierre Merle, sociologue et professeur d’université à Rennes, « le régime politique de l’institution scolaire » n’est pas conforme aux principes généraux du droit ­ lesquels prévalent aussi bien dans la société que dans les discours sur l’école. Au coeur du malentendu : le sentiment d’humiliation que ressentent parfois les élèves, auquel il vient de consacrer une longue recherche qui donnera lieu à un livre : l’Elève humilié (1).

A la question : « L’école, zone de non-droit ? » posée en sous-titre de votre livre, que répondez-vous ?

Je réponds par l’affirmative, sachant que cette absence de droit se manifeste essentiellement dans la classe. Elle est vécue la plupart du temps comme un espace quasi privé, et le droit s’arrête bien souvent dès que la porte se ferme.

Pourquoi ?

Les enseignants, majoritairement, ont le sentiment que ce qui s’y passe ne regarde qu’eux. Et les élèves ont le sentiment qu’il n’existe aucun recours contre les anomalies dont la classe peut être le théâtre.

Il y a pourtant d’autres adultes ?

Oui. Mais un conseiller principal d’éducation n’interviendra que rarissimement pour mettre en cause un enseignant. Quant au chef d’établissement, il est dans une situation délicate : non seulement son pouvoir sur les enseignants est réduit, mais il doit surtout préserver sa relation avec eux ­ comme il n’a quasiment aucun moyen de coercition, il doit compter sur leur collaboration.

Et les parents ?

Ils interviennent peu, par crainte de retombées sur leurs enfants. Et ils n’ont pas tort...

En 2000, une circulaire de l’Education nationale avait pourtant tenté de faire entrer le droit à l’école, notamment en créant des dispositifs de dialogue.

Le destin de ce texte est au coeur du sujet. Il prévoyait effectivement des modifications des règlements intérieurs afin de mettre en application quelques principes généraux du droit. Par exemple la proportionnalité des sanctions, ou l’égalité de tous (adultes et élèves) face à certaines règles ­ la ponctualité, par exemple. Or le règlement intérieur est voté en conseil d’administration dans chaque établissement. Et beaucoup ont choisi de n’introduire que des modifications marginales et de laisser de côté le corps du texte.

Comment est-ce possible ?

Très simplement : l’absence de culture juridique est telle que les membres des conseils d’administration se vivent comme étant au-dessus du ministre ; ils s’arrogent le droit de décider de ce qui leur convient ou pas dans la loi commune. C’est un usage abusif de l’autonomie des établissements et de la liberté qui leur est reconnue.

C’est le fait du Prince ?

Exactement. Et c’est là que tout peut déraper. Quand un enseignant n’a pas de problème pour « tenir » sa classe, il n’est pas tenté de recourir à des méthodes limites. S’il est mis en difficulté, l’autoritarisme devient tentant, et une de ses formes les plus efficaces consiste à humilier les élèves. Il peut le faire bien souvent en toute impunité.

Est-ce fréquent ?

Il est fréquent que les élèves se sentent humiliés. Une enquête statistique avait montré que 50 % des collégiens estimaient avoir été humiliés par un enseignant. Mais cela ne signifie pas du tout que les enseignants se comportent, en tout cas sciemment, de manière humiliante. Un exemple typique de ce que j’ai recueilli dans mon enquête est celui du professeur qui rend une copie en disant publiquement : « Ce n’est pas digne de toi. » L’élève peut se sentir atteint ­ après tout, la notion de dignité renvoie bien à ce qu’il est. Alors que le message est probablement plus proche du : « Tu es passé à côté cette fois-ci, je sais que tu peux faire mieux. » L’enjeu scolaire est tellement fort aujourd’hui que les élèves ont sans doute tendance à prendre plus à coeur ce genre de remarque que par le passé.

Y a-t-il un ressort dominant de l’humiliation ?

Oui : toucher à la vie privée des enfants. Là encore ça peut se faire sans volonté de nuire de la part de l’enseignant. Mais beaucoup ne se rendent pas compte qu’enfants et adolescents n’ont pas envie que leur vie soit étalée sur la place publique ­ parce qu’ils cachent des choses, qu’ils ont honte, que leur rapport au regard des pairs est très sensible. Ces dérapages ne sont pas acceptables : les enseignants n’ont aucune autorité pour exposer la vie privée des élèves.

Certains élèves se sentent-ils plus humiliés ?

Comme souvent, les phénomènes négatifs sont cumulatifs. On s’autorise plus facilement à humilier les faibles. Ceux qui ont de mauvaises notes, ceux dont les parents n’oseront pas venir se plaindre...

Un enseignant qui devient humiliant n’est-il pas confronté à la solitude ?

A la solitude, et aussi au manque de sollicitude de l’administration. Même les enseignants débutants rechignent à parler des difficultés qu’ils rencontrent, et ça ne s’arrange pas par la suite. A l’Education nationale, le discours officiel veut que tout aille bien, qu’on s’en sorte toujours. On est dans une logique de silence et de dénégation, y compris quand les enseignants sont eux-mêmes ­ ou se sentent ­ humiliés, ce qui arrive aussi.

Les débutants sont plus fragiles ?

A l’évidence. Ils ne sont pas préparés à devoir faire leurs preuves comme personnes devant les élèves. Même quand on les prévient, ils pensent confusément qu’avoir fait la preuve de leur compétence en passant les concours sera suffisant pour instaurer leur autorité. L’humiliation peut poindre quand un enseignant ne se sent pas capable d’affronter les élèves. Faut-il qu’il le reconnaisse...

Les enseignants sont-ils conscients du rapport de domination qui se joue ?

S’ils le sont, ils ne le sont pas assez. Je pense qu’ils ne raisonnent que rarement en termes d’organisation politique de la classe, laquelle est une petite société. Instaurez un régime où un seul détient toute l’autorité, sans recours pour ses sujets, et vous vous obtiendrez probablement l’ordre ­ la terreur, ça marche. Mais ne vous étonnez pas que les élèves finissent par se révolter, par tout casser ou par crever des pneus sur les parkings.

(1) Publié en septembre aux PUF.
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