L'UFC-Que choisir
dépose plus de 12.500 demandes d'indemnisation contre les opérateurs
de téléphonie mobile
PARIS (AP - 13 10 06) - L'UFC-Que choisir doit déposer vendredi
matin au tribunal de commerce de Paris 12.530 demandes d'indemnisation
de clients d'opérateurs de téléphonie mobile après
la décision du Conseil de la concurrence de sanctionner Orange,
SFR et Bouygues Télécom pour entente illicite.
L'objectif de cette action est de prouver le caractère "inadapté
et inefficace des procédures à la disposition des consommateurs
et de leurs associations".
Alors que le président Jacques Chirac avait promis début
2005 la mise en place d'une action collective, le projet de loi élaboré
par le ministre de l'Economie Thierry Breton n'a toujours pas été
déposé au Parlement, a rappelé lors d'une conférence
de presse Alain Bazot, président de l'association de défense
des consommateurs.
Actuellement, "chacun des 20 millions d'abonnés (des opérateurs
de téléphonie mobile) doit agir individuellement pour obtenir
réparation (...). A partir d'aujourd'hui, il ne sera plus recevable
de dire que le droit français est suffisant".
Le 1er décembre 2005, le Conseil de la concurrence avait infligé
une amende record de 534 millions d'euros à Orange, SFR et Bouygues
Télécom pour entente illicite et échange d'free.frrmations
entre 1997 et 2003. Les trois opérateurs ont fait appel. A la suite
de cette décision, l'"UFC Que choisir" avait incité les consommateurs
à demander réparation de leur préjudice en déposant
un dossier auprès de ses services.
30 millions de consommateurs
invités à porter plainte
contre les opérateurs
mobiles
02 12 05 -- Par Guillaume Deleurence , 01net.
Un « jeudi noir ». La formule est déjà
consacrée pour qualifier l'amende – 534 millions d"euros – que le
Conseil de la concurrence a infligée ce 1er décembre 2005
aux trois opérateurs de téléphonie mobile. Le long
d'une décision de 90 pages, très sévère, il
les accuse d'avoir échangé, de 1997 à 2003, des free.frrmations
de nature stratégique. Et, plus grave, de s'être réparti,
de 1997 à 2002, les parts de marché. Cette entente illicite
aurait faussé le jeu de la concurrence au détriment des consommateurs,
en fixant des prix artificiellement élevés.
La sanction à peine publiée, l'UFC-Que
Choisir est passée à l'action. L'association ne souhaite
pas se contenter de cette décision qu'elle qualifie « d"historique
». Car les 534 millions, s'ils sont payés un jour – les
opérateurs font appel* – iront dans les caisses du Trésor
public. Les 30 millions de consommateurs lésés, eux, à
hauteur de 1,2 milliard d"euros selon l"UFC-Que Choisir, n'en verront
pas un centime.
« L'heure de la réparation a sonné », indique
Alain Bazot, président de l'association. Il invite donc les clients
des opérateurs à mener des actions individuelles devant la
justice, afin d"obtenir réparation pour le préjudice subi
de 1997 à 2002. Soit la durée où il y aurait eu un
gel des parts de marché. Pour les aider à évaluer
le montant du préjudice, l"UFC-Que Choisir vient de mettre à
leur disposition cartelmobile.org,
un outil de calcul en ligne permettant d"évaluer ce préjudice
« de façon scientifique ». Elle s"est servi de l"évolution
des prix constatés pendant six années sur deux marchés
nordiques, le Danemark et la Finlande, jugés comme des références
en matière de concurrence.
L"action collective très attendue
A partir des free.frrmations fournies par un consommateur (opérateur,
montant et durée du forfait…), l'outil établit en quelques
secondes le préjudice estimé. A noter que les clients prépayés
ne pourront que très difficilement recourir à ce système,
à moins d"avoir conservé toutes leurs factures. Une fois
le calcul effectué, l"association incite les clients à réclamer
une indemnisation au juge de proximité, qui traite les litiges portant
sur des sommes inférieures à 4 000 euros. L'UFC-Que Choisir,
qui va aussi assigner chaque opérateur devant la justice pour obtenir
réparation du préjudice collectif, les aidera via ses antennes
locales à effectuer ces démarches individuelles.
Mais il est clair, pour Alain Bazot, que le nombre de clients qui oseront
passer à l'acte ne dépassera pas quelques dizaines de milliers,
« au mieux 40 000, alors que le nombre total de victimes avoisine
les 30 millions ». Conséquence : L"UFC-Que Choisir souhaite
donc que l'action en nom collectif, ou class action, procédure habituelle
aux Etats-Unis, intègre au plus vite le droit français. Le
Président de la République Jacques Chirac, en janvier 2005,
l"avait lui-même souhaité. Attendues début octobre,
les conclusions du groupe de travail sur le sujet, en coordination avec
les ministères de la Justice et de la Consommation, ne sont pas
encore connues.
Estimant enfin que les amendes infligées ne permettront pas une
concurrence meilleure en France, l'UFC-Que Choisir en appelle au
régulateur français des télécoms, l"Arcep,
et à la Commission européenne. « Il y a un besoin
de régulation considérable », estime Alain Bazot.
«
Nous demandons une régulation des prix de gros, ajoute Julien Dourgnon,
directeur des études et de la communication de l"association. La
marge de manœuvre des opérateurs virtuels, par exemple, est nulle.
Il ne faut donc pas attendre d"eux de baisse des prix. »
* Non seulement les opérateurs font appel de la décision
du Conseil de la concurrence, mais ils pourraient aussi éventuellement
remettre en cause toute la procédure, étant donné
que des fuites concernant l'enquête de la Direction générale
de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes
(DGCCRF) ont été publiées dans Le Canard Enchaîné
à la fin août :
Orange,
SFR et Bouygues accusés d'avoir conclu
"un
Yalta du portable"
Condamnation des opérateurs:
déjà 110.000 demandes d'évaluation de préjudice
En quatre jours, le service en ligne d'évaluation de préjudice
de l'UFC-Que Choisir a reçu 110.000 inscriptions. Reste à
voir combien de consommateurs engageront des procédures contre les
opérateurs mobiles pour obtenir réparation.
Depuis le 1er décembre, date de la condamnation par le Conseil
de la concurrence d'Orange, SFR et Bouygues Telecom, 110.000 consommateurs
se sont déjà inscrits sur le site Cartemobile.org, mis en
place par l'association UFC-Que Choisir.
Ce site donne accès à un outil de calcul en ligne qui
évalue le montant du préjudice subi sur la période
allant de janvier 2000 à décembre 2002. «Cet outil
est essentiel, car la principale difficulté concrète dans
ce type d'affaire est de chiffrer chaque préjudice», nous
confiait récemment Alain Bazot, président de l'UFC-Que Choisir.
L'association indique avoir réalisé ce service avec le concours
de plusieurs cabinets d'études économiques.
«Reste maintenant à savoir combien de consommateurs
vont réellement engager une procédure», commente Gaëlle
Pateta, sa directrice juridique. Une des possibilités est de rejoindre
l'action entamée par l'UFC auprès de trois tribunaux d'instance
pour «préjudice à l'intérêt collectif»:
Paris 8e pour SFR; Antony (Hauts-de-Seine) pour Orange; et Boulogne (Hauts-de-Seine)
pour Bouygues Telecom.
L'association table sur la perception de moins de 10.000 euros de réparation
pour son compte; une somme qui servira à recouvrer le financement
de son action. Car les démarches sont totalement gratuites pour
les consommateurs qui décident de la rejoindre. Et chacun recevra,
en cas de succès, une réparation basée sur l'évaluation
qu'elle aura présentée au juge.
L'UFC pense rassembler 40.000 consommateurs
«Nous pensons recevoir 40.000 demandes qui vont venir s'associer
à notre action», estime Gaëlle Pateta. Un «défi»
pour l'UFC-Que Choisir qui a mobilisé sept juristes sur ce dossier.
Les demandes peuvent se faire en ligne. Seule condition: disposer des factures
de son opérateur mobile couvrant la période jugée
par le Conseil de la concurrence.
Par ailleurs, comme l'évoquait Alain Bazot, chaque abonné
peut aussi faire valoir ses droits individuellement auprès d'un
juge de proximité. Là également, l'UFC va appuyer
les démarches en publiant sur son site des modèles de formulaires,
et organiser des journées portes ouvertes dans ses 300 antennes
locales.
L'association estime que ces procédures engorgeront l'administration
judiciaire. Et lui fourniront un argument de poids pour réclamer
une nouvelle fois l'intégration dans le droit français des
«actions
en nom collectif».
L'UFC-Que Choisir chiffre à 1,2 milliard d'euros le préjudice
subi par les consommateurs, soit environ 130 euros en moyenne par abonné
à un téléphone mobile. L'association avait déclenché
la procédure en février 2002 avec une saisine auprès
du Conseil de la concurrence.
Les cocus du portable
en ligne
LES clients des opérateurs de téléphonie
mobile qui, au vu de la décision du Conseil de la concurrence, exigent
le remboursement des sommes indûment payées entre 1997 et
2002 ne sont pas au bout de leurs peines. Mardi, à l'heure de bouclage
du « Canard »,130000 mécontents avaient déjà
pris contact avec le site Internet de l'organisation Que choisir.
Selon elle, le préjudice subi par quelque 30 millions d'abonnés
se monte à 1,2 milliard d'euros, soit, en moyenne, 40 euros par
abonné en cinq ans.
Avant de pouvoir entamer une action judiciaire, les abonnés
concernés devront attendre que la cour d'appel - saisie par les
opérateurs - daigne confirmer la décision du Conseil de la
concurrence. Ce n'est pas joué : le Conseil a en effet décidé
que son amende couvrait également les «dommages causés
à l'économie au détriment des consommateurs ».
Ceux-ci, déjà indemnisés, ne sauraient ainsi prétendre
à rien de plus, affirment les opérateurs.
Après la décision en appel (fin 2006, si tout va bien),
les abonnés mécontents devront constituer un dossier et se
choisir un avocat, avec les frais afférents, Seulement 40 000 abonnés
pourront s'associer à la procédure pilotée par Que
choisir (audelà, l'organisation s'affirme incapable de
gérer le maelstrom judiciaire). On imagine d'ici la tête du
modeste juge d'instance de la rue Mouton-Duvernet, à Paris (ou ses
confrères des rues de Lisbonne ou Paul-Bert), submergé par
des dizaines de milliers de dossiers. Engorgement assuré.
Il n'existe en effet rien de comparable à la procédure
américaine de la «class action" : elle permet d'instruire
une plainte unique, quel que soit le nombre de victimes d'un même
événement. Chirac avait bien promis l'intégration
prochaine de la «class action" dans le droit français.
Mais, comme d'habitude, il avait promis un peu vite. Le Medef ne veut pas
en entendre parler et la commission constituée pour réfléchir
à la question, qui devait rendre ses conclusions voilà deux
mois, cogite encore.
Seule certitude, le grand gagnant de l'opération reste l'Etat,
qui gagne plus de 1 milliard au passage: en tant qu'actionnaire principal
de France Telecom, il a encaissé - selon les calculs de Que choisir
plus de 500 millions d'euros de profits illicites. Et, aujourd'hui,
il va empocher une amende de plus d'un demi-milliard d'euros.
Y a bon la triche!